Vincent Genot
Vincent Genot Rédacteur en chef adjoint Newsroom

Dessinateur minimaliste et scénariste prolifique, Lewis Trondheim, tel Tartarin de Tarascon, transforme son quotidien en aventures rocambolesques. Des Petits Riens qui prennent parfois des allures de fables philosophiques.

De son vrai nom Laurent Chabosy, Lewis Trondheim est une star de la bande dessinée contemporaine. A l’origine de la maison d’édition l’Association, dont il est l’un des sept fondateurs, on le considère souvent comme l’un des initiateurs de la nouvelle bande dessinée. A savoir, une BD qui se fiche comme d’une guigne des formats et des règles établis par les grands éditeurs. La nouvelle BD, c’est plutôt  » faisons ce que nous avons envie de faire et voyons si cela rencontre les attentes du public (ou pas)« .

Dans un premier temps, ses adeptes regroupés dans d’obscurs ateliers prônent la disparition de la couleur au profit d’un noir et blanc dont le trait bien visible permet des discussions à n’en plus finir sur la maestria des dessinateurs. Plus pénible: libérés des anciens carcans, les auteurs multiplient les formats incongrus qui font exploser la taille des rayonnages de bibliothèques. Reste que l’apparition de ces albums/livres sur les tables de salon permet de sortir de l’anonymat quelques pointures de l’envergure de Christophe Blain, Joann Sfar, Stanislas, David B. ou encore Marjane Satrapi. La narration prend également une claque au point, parfois, de laisser le lecteur sur le carreau. L’ellipse est courante, le découpage des planches ne se fait plus à la scie égoïne, mais à la tronçonneuse ou à la pince à épiler. Bref, la nouvelle BD teste tellement qu’elle finit par redéfinir les codes et renouveler salutairement un art qui avait un peu trop tendance à produire de la série à la pelle.

Stakhanoviste chauve

La première contribution de Trondheim à cette évolution sera un pavé de 500 pages remplies de toutes petites cases. Ouvrage expérimental, Lapinot et les carottes de Patagonie (publié par les éditions Le Lézard et L’Association, en 1992) permet à l’auteur d’illustrer ses propres scénarios desquels sortira sa série la plus célèbre: les Formidables Aventures de Lapinot, dont le deuxième tome obtiendra l’Alph-Art Coup de c£ur au Festival d’Angoulême en 1994. Ensuite, la machine s’emballe. Stakhanoviste comme on n’en fait plus, Trondheim multiplie les sorties et les collaborations dont la plus célèbre, en compagnie de Joann Sfar, est l’élaboration de la série des Donjon chez Delcourt. Proposant six séries en une, les albums de cette collection (32 parus actuellement sur les 300 initialement prévus) mis en images par de nombreux dessinateurs invités devraient, au final, ne former qu’une seule et même histoire. Plus télégénique, son personnage de La Mouche (avec lequel il inaugure la BD sans texte) fera le bonheur des téléspectateurs dans une trentaine d’épisodes au format dessin animé.

Consécration ultime (jusqu’à la prochaine), en 2005, Trondheim crée et dirige la collection « Shampooing », aux Éditions Delcourt. Déjà riche d’une cinquantaine d’ouvrages, cette  » collection où Lewis Trondheim met tout ce qui lui plait » devient une valeur sûre de la BD avec des auteurs comme Guy Delisle, Mathieu Sapin, Boulet, Fred Neidhardt, Cyril Pedrosa ou encore Winshluss… et Trondheim qui y publie, notamment, ces recueils de Petits Riens dans lesquels il met en scène son quotidien, où le sexe, selon ses dires, tient une place prépondérante. On croise les doigts pour qu’il ne tombe jamais en panne de viagra.

u www.lewistrondheim.com

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