ALORS QUE L’INSTITUTION CAROLINE MUSIC ANNONCE SA FERMETURE POUR MI-OCTOBRE, QU’ON SE DEMANDE OÙ ON IRA DÉSORMAIS ACHETER NOS PLAQUES, L’HEURE DE LA REN-TRÉE A SONNÉ. ET AVEC ELLE CELLE DU NOUVEL ANIMAL COLLECTIVE. FRAPPÉ ET EXCITANT.

C’est du côté de l’un des premiers jeux vidéo créés par une femme, et d’une bestiole cousine du mille-pattes qui a inspiré un film d’horreur hollandais bien dégueulasse où un savant fou crée une chaîne d’êtres humains cousus de bouche à anus, que les zozos d’Animal Collective ont été chercher le titre de leur neuvième album. Centipede Hz (prononcez Hertz) est lui aussi une drôle de bébête. Dave Portner (Avey Tare) et Brian Weitz (Geologist) font les présentations.

Pour vous interviewer, on a dû promettre de ne publier aucun commentaire dans les médias avant le 1er août. Pas même de message sur Facebook ou Twitter. Vous n’en faites pas un petit peu trop?

Geologist: Laurence Bell, le boss de Domino, est plus old school que nous. On en a parlé avec le label. On ne savait pas qu’il serait question de commentaires sur les réseaux sociaux mais ça a du sens quand on sait ce qui nous est arrivé avec notre album précédent. Des journalistes avaient reçu le disque à l’avance et un type a piraté ma boîte mail, prétendu être moi et leur a demandé de mettre les chansons en ligne. Quelqu’un a dépassé une barrière qu’on ne pensait jamais voir franchie. A tout le moins avec un groupe comme le nôtre.

De manière générale, Internet ôte à la musique pas mal de son mystère…

Geologist: Ça dépend comment tu l’utilises. Je trouve qu’il peut aussi être un formidable outil pour l’entretenir. On essaie de le mettre à profit. Comme avec nos petites vidéos promotionnelles qui me semblent une manière plus excitante et amusante d’annoncer une tracklisting que d’envoyer un communiqué à Pitchfork. En même temps, je ne suis pas convaincu que les gens veulent encore du mystère aujourd’hui. En plus, c’est une course contre la montre. Tu sais que quelqu’un, quelque part, travaille contre toi. C’est notre expérience. On peut me qualifier de parano… On a usurpé mon identité pendant une journée. J’ai dû aller me justifier à quinze journalistes. Ce n’est pas parce que ce sont les risques du Net qu’on doit les accepter.

Quand Deakin a-t-il décidé de réintégrer le groupe?

Geologist: Nous savions tous qu’il reviendrait un jour ou l’autre. Quand nous avons commencé à bosser sur Merriweather Post Pavilion, nous ne pouvions pas déterminer combien de temps nous mettrions avant de donner vie à son successeur. Mais entretemps, nous avons travaillé tous les quatre sur l’album visuel Oddsac. Deakin n’a pas abandonné le navire. Il est resté impliqué. Nous savions donc que quand nous reviendrions à un disque et des lives plus traditionnels, il serait de la partie. On savait qu’il voulait revenir.

Dans quel état d’esprit avez-vous abordé ce nouvel album?

Avey Tare: On savait depuis le début qu’il serait moins électronique et plus orienté instruments. Qu’avec le retour de Josh (Deakin), sur scène et en studio, il y aurait plus de grattes sur le disque. Noah (Lennox, alias Panda Bear) voulait par ailleurs se remettre à la vraie batterie. Jouer d’instruments commençait à nous manquer. Ça a été dur d’adapter à la scène une création de studio comme Merriweather. Beaucoup de chansons étaient construites à base de samples et de configurations minimalistes, ça rendait nos prestations moins enthousiasmantes qu’avant. Nous voulions aussi revenir à quelque chose de plus agressif. Merriweather était un disque terrestre. Centipede Hz est un voyage dans un vaisseau spatial. Mais pas pour autant ambient ou dreamy.

Vous avez créé de la musique pour le Guggenheim. Sorti des disques avec des pochettes en trompe-l’£il. Réalisé une vidéo time lapse racontant la confection de votre album Strawberry Jam… Quel rapport entretenez-vous avec l’image?

Avey Tare: Les arts visuels sont une grande source d’inspiration, peut-être pour certains plus que pour d’autres, mais on aime tous que la musique y soit associée. De là où on vient, il y avait pas mal d’artistes visuels musiciens. Je pense à Black Dice. Un groupe qui m’a toujours beaucoup excité comme les projets solos d’Eric Copeland. Plein de gens du côté de Rhode Island fréquentaient des écoles d’art. Des plus vieilles choses aussi me marquent comme les Sun City Girls. Ils se cachaient derrière des tenues, du maquillage et ont mis l’accent sur l’aspect visuel de la musique de manière à ce qu’on ne s’attarde pas sur des personnalités. On a toujours approché Animal Collective de la sorte. Evité de nous mettre en avant pour pouvoir créer un univers, un écrin à nos chansons.

Geologist: Beaucoup de films, surtout de science-fiction, ont nourri notre nouvel album. J’ai aussi été marqué par l’écrivain H.P. Lovecraft et par les images que je me projetais dans la tête de toutes ses histoires. On a entendu parler de ce long-métrage, The Human Centipede, mais on ne l’a jamais regardé. Ces trucs de torture ne sont pas trop pour nous. l

ENTRETIEN JULIEN BROQUET

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content