RÉVÉLÉE PAR MILLENIUM, L’ACTRICE SUÉDOISE TIENT LE PREMIER RÔLE DE PROMETHEUS, LE NOUVEAU FILM DE RIDLEY SCOTT, QUI VOIT CE DERNIER RENOUER AVEC LA SCIENCE-FICTION ET LES FONDEMENTS DE ALIEN.

Avant Rooney Mara, vedette de The Girl With the Dragon Tattoo, il y eut Noomi Rapace, Lisbeth Salander dans la version originale de la trilogie Millenium, adaptée par Niels Arden Oplev des romans cultes de Stieg Larsson, et le rôle qui allait faire de l’actrice suédoise une star. Quelques films indépendants (dont Beyond de Pernilla August, remarqué à Venise et sorti discrètement sur nos écrans) et un blockbuster ( Sher-lock Holmes: A Game of Shadows ) plus loin, la voilà qui s’at-tèle à un autre mythe: l’ombre de Ellen Ripley plane en effet sur Elizabeth Shaw, le personnage qu’elle incarne dans Prometheus, le nouveau film de Ridley Scott.

Présenté un temps comme le prequel de Alien, celui-ci envoie un groupe d’explorateurs dans les recoins les plus sombres du cosmos, après qu’ils ont découvert un indice sur l’origine de l’humanité sur Terre. A la tête de cette mission, Shaw ajoute à son profil de scientifique celui de croyante – « dans la noirceur des situations les plus atroces, elle trouve sa force et sa puissance dans sa foi. Contrairement à la plupart des personnages que j’ai interprétés, qui étaient des êtres abîmés par la vie, et guidés par la haine et la colère, elle est passée par des phases difficiles tout en réussissant à rester constructive. Devoir lui donner vie, avec le concours de Ridley, et la trouver en moi s’est avéré fascinant. Je n’aime pas feindre: je dois trouver des choses en moi, et les traduire dans le personnage. »

À l’ombre du corbeau

Rapace n’a assurément pas froid aux yeux, dont elle vous fixe alors que vous l’interrogez sur l’origine de son surnom (elle est née Noomi Norén, en 1979): « J’ai toujours été attirée par ces oiseaux. A l’époque où j’habitais en Islande, j’ai vu un jour un faucon qui s’était posé tout près de moi, et qui me fixait. Je me souviens avoir trouvé quelque chose de divin dans son regard où s’exprimait une telle sagesse -comme s’il savait toute chose. Et j’en ai nourri une obsession pour ces oiseaux. » L’Islande, c’est là aussi qu’elle a découvert sa vocation d’actrice, alors qu’elle n’était encore qu’une enfant. « A l’âge de 7 ans, j’ai été engagée comme figurante dans un film intituléIn the Shadow of the Raven, réalisé par un cinéaste islandais que je ne saurais mieux qualifier que d’intense (il s’agit de Hrafn Gunnlaugson, ndlr). Il s’agissait d’une histoire d’amour perturbée et folle, un film de vikings sur lequel je suis restée trois semaines. J’ai tellement adoré que je ne voulais plus rentrer à la maison: c’est comme si une porte s’était ouverte devant moi. Voir des adultes jouer, et faire semblant de la manière la plus sérieuse qui soit, avait des allures de paradis pour l’enfant que j’étais. Dès lors, j’ai su que je voulais devenir actrice. » Le moment venu, elle intégrera la Stockholm Theatre School, avant de se multiplier sur scène et au petit écran -avec notamment un rôle récurrent dans la série suédoise The Kronor. Depuis, la carrière de Rapace n’a pas dérivé de sa trajectoire ascensionnelle. Pour peu, on jurerait qu’elle s’en pince encore elle-même. Ainsi lorsqu’elle évoque sa première rencontre, inopinée pour ainsi dire, avec Ridley Scott alors qu’elle assistait à une réunion de travail à laquelle il n’était pas censé participer. « J’étais sous le choc, et lui de me dire qu’il avait vu The Girl with the Dragon Tattoo trois fois, et qu’il aimerait travailler avec moi. C’était absolument irréel pour moi, qui avais vu ses films, et notamment Alien fort jeune. Je n’irais pas jusqu’à dire que ce film a changé ma vie, mais il a néanmoins eu un impact immense sur moi: c’était la première fois que je voyais une femme faire ce que faisait Sigourney Weaver. A l’époque, nous ne disposions guère de modèles, c’était un monde exclusivement masculin, et voilà qu’apparaissait quelque chose de complètement différent. »

Sur le bord

Si Ellen Ripley demeure une icône, Lisbeth Salander en fut assurément une autre, produit d’un temps tout en aspérités – « pour moi, la vie présente deux facettes, l’une lumineuse et l’autre sombre, et j’aime me trouver sur le bord, quand cela peut basculer dans n’importe quelle direction. Parce que c’est cela, vivre. Je suis attirée par des gens courageux, qui explorent les choses et sont en recherche. L’idée de rassasiement a quelque chose d’ennuyeux à mes yeux. »

En travaillant avec les réalisateurs les plus exigeants -après Ridley Scott, il y aura Brian DePalma, pour Passion, un remake du Crime d’amour d’Alain Corneau-, Noomi Rapace sait, en tout cas, comment se prémunir de la routine. Lui demande-t-on encore si elle compte désormais décliner sa carrière en caractères hollywoodiens, qu’elle répond ne pas envisager les choses sous cet angle. « Je n’ai pas vraiment de plan. Jouer, c’est un monde de possibilités. »

PROMETHEUS, DE RIDLEY SCOTT. CRITIQUE EN LIGNE SUR WWW.FOCUSVIF.BE LE 30/05, ET DANS FOCUS VIF LE 07/06.

RENCONTRE JEAN-FRANÇOIS PLUIJGERS, À LONDRES

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