Le Passe-Partout ***1/2

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Paru en 1962 au Japon sous le titre Ooinaru gen’ei (Grande illusion), le premier roman de l’autrice, chanteuse et actrice féministe Masako Togawa (1931-2016) y fait l’objet d’un véritable culte. L’ouvrage est éminemment savoureux il est vrai, qui balade le lecteur dans les méandres d’une intrigue à tiroirs à la construction aussi labyrinthique que savante, tout en dressant, d’une écriture épurée, le portrait de la société nipponne de l’après-guerre. Tout commence par un banal accident de circulation, au matin du 1er avril 1951, lorsqu’une femme, la tête couverte d’une écharpe rouge, est renversée par un camion, le médecin chargé de constater le décès découvrant qu’il s’agissait en fait d’un homme. La première d’une série de surprises qui émailleront un récit adoptant bientôt pour cadre quasi exclusif la résidence K, édifice de briques rouges accueillant dans ses 150 logements des femmes célibataires et leurs secrets. Et il y en a des choses à cacher au détour de ces couloirs sombres, rapt d’enfant, vol d’un violon, agissements d’une secte et l’on en passe, sans même parler des rumeurs, jalousies et indiscrétions tapissant le quotidien de la résidence que la disparition du passe-partout ouvrant tous les appartements, couplée au prochain déplacement du bâtiment, va mettre en émoi. La clé d’un astucieux suspense auquel Masako Togawa imprime un parfum de mystère et des contours vaguement feuilletonnesques, non sans livrer, en creux, une peinture inspirée du Tokyo d’alors, dont l’atmosphère enveloppe un récit déclinant la solitude au féminin pluriel…

© National

De Masako Togawa, éditions Denoël, traduit du japonais par Sophie Refle, 176 pages.

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