Après John Kennedy et Richard Nixon, l’actuel président George W. Bush inspire la caméra d’Oliver Stone (PHoto). Une trilogie aussi intéressante qu’inégale.

Oliver Stone n’a jamais fait grand mystère de ses engagements politiques penchant vers la gauche et affichant une méfiance certaine vis-à-vis d’un système dont le cinéaste un tantinet parano ne pouvait manquer de mal ressentir les dérives. Pour la troisième fois, son regard de réalisateur citoyen se tourne vers la Maison-Blanche avec un W. – L’Improbable président tout juste sorti ce mercredi en Belgique. Succès populaire aux Etats-Unis, ce film tourné, monté et mixé en un temps record pour être prêt avant l’élection de la semaine prochaine s’inscrit dans une trilogie présidentielle involontaire. Car si Stone avait consciemment composé un diptyque avec JFK (1991) et Nixon (1995), l’idée de consacrer un film à l’actuel locataire de la Maison-Blanche ne s’est imposée à lui qu’in extremis, l’année dernière, à l’approche d’un scrutin où l’héritage politique de George W. est appelé à peser lourd…

Le portrait en mouvement de Bush Junior, interprété de saisissante manière par Josh Brolin ( No Country For Old Men), retrace quelques étapes marquantes de sa trajectoire. En commençant par son bizutage d’étudiant et en suivant ses échecs professionnels, sur fond d’alcoolisme et de difficultés à convaincre de sa valeur un père (formidable James Cromwell) promis à la présidence et semblant préférer son frère Jeb… devenu depuis gouverneur de Floride. Les scènes familiales ne manquent parfois pas de sel, mais ce sont les séquences directement politiques, recréant les réunions où se décide l’intervention en Irak, qui captent bien sûr essentiellement l’attention. Des comédiens épatants y campent des personnages connus, tels Dick Cheney (génial Richard Dreyfuss) et Colin Powell (impeccable Jeffrey Wright). L’ensemble, pourtant, manque d’acidité, de consistance aussi. Mais l’inconsistance même du personnage explique peut-être cela…

Toujours est-il que W. – L’Improbable président reste fort en retrait de ces franches réussites que sont JFK et surtout Nixon. Du premier, on retient une structure kaléidoscopique reflétant la complexité du dossier de l’assassinat de John Fitzgerald Kennedy. Kevin Costner y incarne Jim Garrison, le procureur (district attorney) de la Nouvelle-Orléans qui remit en cause les conclusions de l’enquête officielle et exprima ses forts soupçons d’un complot criminel contre le très populaire président démocrate. Dans Nixon, pas de thèse mais une plongée captivante dans l’enfer personnel d’un homme parvenu au sommet du pouvoir et que ses errements conduisent à la chute, à l’opprobre. Anthony Hopkins est extraordinaire d’intensité dans ce rôle éminemment tragique, que la réalisation très concentrée inscrit dans une atmosphère digne d’un (grand) film… fantastique. Des fantômes hantent la Maison-Blanche dans cette £uvre singulière, la meilleure peut-être d’un cinéaste passionnant mais très inégal.

Texte Louis Danvers

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