Le punch de Huston – Ouvres d’un cinéaste largement septuagénaire, Wise Blood et Under the Volcano témoignent éloquemment de l’inépuisable vitalité de John Huston.

De John Huston. Avec Brad Dourif, Harry Dean Stanton, Dan Shor. 1979. 1 h 41. Twin Pics.(1)

De John Huston. Avec Albert Finney, Jacqueline Bisset, Anthony Andrews. 1984. 1 h 48. Twin Pics. (2)

Sujets originaux et adaptations littéraires cohabitent harmonieusement dans l’abondante filmographique de John Huston, les secondes étant souvent, paradoxalement, à la source de ses £uvres les plus personnelles. Démonstration à travers les deux films réunis dans ce coffret, hustoniens en diable et inspirés, pour l’un, de Wise Blood, le roman de Flannery O’Connor, et pour l’autre de Under the Volcano, ouvrage culte de Malcolm Lowry.

Wise Blood nous conduit dans le sud des Etats-Unis, sur les pas de Hazel Motes (Brad Dourif, halluciné), un jeune homme qui, de retour de la guerre, décide de se rendre à la ville pour bientôt se muer en prédicateur de « l’Eglise du Christ sans Christ », et pourfendre les charlatans et autres marchands de religion. Comme souvent chez Huston, le propos hésite entre tragique ravageur et grotesque assumé. Encore que la sobriété de la mise en scène confère à l’£uvre une force singulière et pénétrante, celle aussi d’un film en forme de portrait féroce d’une Amérique profonde livrée, en guise de foi, aux commerçants du culte.

Geoffrey Firmin (Albert Finney), consul britannique au Mexique, et personnage central de Under the Volcano, évolue également à l’envers du monde, à qui il a choisi d’opposer un alcoolisme assumé avec panache. Le retour de sa femme ne l’arrachera pas à son errance, dont l’issue fatale est écrite dès un générique ouvrant sur la Fête des Morts. Huston dépeint ce destin tragique la passion à fleur de caméra, conférant à son personnage imbibé l’aura d’un héros mythique – non sans inscrire son histoire dans une perspective politique; nous sommes à la fin des années 30.

Des personnages à la mesure de son cinéma

Le réalisateur signe ici un film baigné de fureur et de désespoir, aussi poignant que magistral; une £uvre transcendée par Albert Finney et magnifiée par la photographie de Gabriel Figueroa, non sans témoigner éloquemment d’une vigueur et d’une inspiration intactes. John Huston trouvait il est vrai, dans Wise Blood comme dans Under the Volcano, des personnages à la mesure de son cinéma: chacun à sa façon, Hazel Motes et Geoffrey Firmin s’inscrivent dans la lignée du Achab de Moby Dick ou du Daniel Dravot de The Man Who Would Be King, figures don quichottesques se battant au nom d’un idéal, la déception dut-elle se trouver au bout du chemin…

Un motif on ne peut plus hustonien, abondamment étayé dans de remarquables suppléments, que complète encore un documentaire captivant montrant le cinéaste à l’£uvre sur le tournage de Under the Volcano.

Jean-François Pluijgers

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