Le fils de personne – Itinéraire d’un enfant placé

© DR

Il vivait chez eux avant de commencer à marcher. Yanie a aujourd’hui quatorze ans et il doit dire au revoir à Jacques et Myriam. L’adolescent est chamboulé. Ses parents d’accueil prennent leur retraite et il revoit sa mère tout juste sortie de prison. Elle réclame même sa garde. En attendant, le gamin s’installe chez Vlassia et William. Avec le risque, si ça ne colle pas, de se retrouver en foyer. Cruauté de la vie à hauteur de gosse, Itinéraire d’un enfant placé se décline en trois actes: « C’est comme mourir une première fois mais pas en vrai ». « Il n’y a pas de raison que ça se passe mal ». Et « Sauve-toi Yanie »… Les titres des chapitres laissent imaginer l’ambiance morose et la dureté du quotidien. Ketty Rios Palma voulait depuis toujours raconter la résilience de son père, ancien enfant de la DDASS. Avec Itinéraire d’un enfant placé, elle offre au regard ce moment où, dans la vie de ces adolescents, tout peut basculer. Visage rondouillet, petites lunettes, allure bonhomme, gentil, poli, bien élevé, Yanie est bringuebalé à droite à gauche et semble de plus en plus désemparé. Sa génitrice veut lui faire couper les ponts avec ceux qui l’ont élevé. Les choses ne se passent pas bien à l’école. De la maison campagnarde de sa nouvelle famille à l’appartement exigu de sa maman biologique, Rios Palma filme l’enfant au milieu des adultes. Psychologues, éducateurs, assistants sociaux et parents (de substitution ou non). Le gamin, lui, se confie de temps en temps devant la petite caméra qu’on lui a donnée ( » un moyen de ne pas être trop intrusive en arrivant avec plein de questions, à aller fouiller », selon la réalisatrice). Tiraillé entre l’envie de mieux connaître celle qui l’a fait naître, l’amour qu’il porte à ceux qui l’ont aidé à grandir et la nécessité de stabilité, il parle de Myriam et Jacques. Évoque tout l’amour que sa mère ne lui a pas donné. Lorsque Yanie a été conçu, le père sortait de cabane (il y est retourné depuis et l’ado lui rend visite derrière les barreaux). La mère faisait la manche. Aujourd’hui, il ne se sent le fils de personne. Rios Palma dépeint avec beaucoup de justesse le quotidien bouleversant du petit homme. Dur, triste, plombant mais plein d’empathie, jamais donneur de leçon ou manichéen, ce documentaire primé à Luchon et produit par Mélissa Theuriau se révèle être un récit d’apprentissage cruel, intime et pudique.

Documentaire de Ketty Rios Palma.

8

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content