Le Bruit des tuiles

En 1855, l’ingénieur économiste polytechnicien français Victor Considerant imagine un projet révolutionnaire de vie communautaire inspiré des phalanstères. Ce disciple de Charles Fourier recrute des colons français et suisses et fait acheter des terres à Dallas, pour y fonder la nouvelle ville de Réunion. Mais Le Bruit des tuiles nous dévoile tôt que dans ce Texas exsangue, il faut nous tenir prêts à la chute d’une utopie plutôt qu’à son succès… Le texte aligne en nuances fines ce qui fit espoir ou grinça, de la langue choisie de persuasion à l’enthousiasme qui fit oublier aux colons le cadre patiemment transmis par Considerant. S’arrimant avec fluidité et poésie tangible à des motifs déjà apparents dans ses précédents romans (un protagoniste faillible dans La Ballade de Jackson C. Frank, les germes d’une pensée et mode de vie alternatifs dans Élisée, avant les ruisseaux et les montagnes), Thomas Giraud écrit une exofiction dans les ornières de l’Histoire. Au sein du phalanstère, il préfère aussi sonder, dans leurs gestes simples, ces sociétaires pétris d’idéalisme ou fatalistes plutôt que le seul visionnaire voyant l’inéluctable dégringolade se rapprocher au fil des cinq années. Le vivre ensemble en prend un fameux coup dans l’aile après l’expérience, mais n’est-ce pas préférable à un rêve qui s’étiolerait avant même d’être planté en terre?

De Thomas Giraud, éditions La Contre-Allée, 282 pages.

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