Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

CHAQUE ANNÉE, LE FESTIVAL INTERNATIONAL DE KNOKKE-HEIST OFFRE UN INSTANTANÉ DE LA PHOTOGRAPHIE CONTEMPORAINE. AVEC CETTE FOIS L’AFRIQUE EN LIGNE DE MIRE.

Festival international de photographie de Knokke-Heist

AU CENTRE CULTUREL SCHARPOORD ET EN DIVERS AUTRES LIEUX DE KNOKKE. JUSQU’AU 09/06.

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C’est un rendez-vous photographique qu’il serait dommage de manquer. A chaque nouvelle édition, le festival de Knokke livre un panorama vivant et varié de la photographie contemporaine. Loin d’être replié sur une création qui ne serait que nationale ou sur une programmation monothématique, l’événement est de ceux qui déploient leurs ailes. Cette année, ce sont six expositions qui se partagent l’affiche. Parmi les temps forts, on retiendra Unknown Masterpieces, qui joue les têtes chercheuses en plaçant sous les feux de la rampe le travail d’artistes dont l’heure de gloire est encore à venir. La sélection ne déçoit pas. On songe tout particulièrement au travail d’Aaron Lapeirre, photographe belge installé à Berlin. Cet expatrié a signé une série remarquable autour de l’atmosphère de la Guerre froide à travers une imagerie inspirée à la fois par la mode et l’univers du polar. Il faut également mentionner le travail de Dieter Vanfraechem qui, à travers Latent Envelopment, explore les apories de la photographie. Afin de corriger la trahison ontologique du processus qui restitue un monde en trois dimensions sur une surface plane, Vanfraechem projette des images sur des corps afin de « jeter un pont entre ces deux mondes« . Un mot encore sur la série Apocalypse Inc. d’Arno de Pooter, directement inspirée par le récit des dix plaies d’Egypte tel qu’il est raconté par Le livre de l’Exode. Ce retoucheur surdoué a transposé la matière de ces fléaux bibliques en imaginant leurs avatars dans notre société contemporaine. Le tout avec un immeuble de bureaux désaffecté pour toile de fond.

Haut en couleurs

L’autre temps fort de la manifestation est à n’en pas douter l’exposition en plein air Haute Africa, parfait remède aux « tristes tropiques » qui fait exploser ses couleurs à travers les camaïeux de gris de la station balnéaire. Cet accrochage urbain réunissant le travail de seize photographes se présente comme « une étude anthropologique sur la culture vestimentaire africaine contemporaine« . Qui dit « culture vestimentaire africaine contemporaine » renvoie forcément aux célèbres « rois de la sape » dont le dandysme redore le blason de tout un continent. A travers les images de Baudouin Mouanda ou d’Hector Médiavilla, on découvre les fastes de cette attitude dont les origines remontent à G.A. Matsoua, premier Congolais qui, en 1922, revint de Paris habillé comme un gentilhomme français. Contrairement à ce que l’on croit trop vite lorsque l’on observe le phénomène depuis l’Europe, la sape est plurielle. Pour s’en convaincre, on ne manquera pas les clichés d’un Daniel Tamagni qui explore les différentes factions que recouvre ce terme générique. On voit ainsi surgir les sapeurs « Afrometal » du Botswana, dont l’apparence semble directement inspirée par un nouvel épisode de Mad Max: bracelets cloutés, pantalons de cuir noir, gants de motard, cheveux dressés en crête… Ce faisceau de lumière braqué sur une autre Afrique que celle des premiers temps de l’humanité -poncif qui a la peau dur- est également enrichi d’une série d’images de Martin Parr qui a choisi, on le sait, de montrer les nantis de ce monde. « Donner un visage à la richesse« , comme d’autres en donnent un à la pauvreté, est le programme du photographe britannique qui entend nous rappeler la situation économique intenable qui est la nôtre. Et à laquelle nous apportons chaque jour notre pierre.

HTTP://FOTOFESTIVAL.KNOKKE-HEIST.BE

MICHEL VERLINDEN

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