La Route de Berlin

Une mère est séparée de son fils dans une capitale allemande ravagée par la chaleur, un volcan et un tremblement de terre.

L’histoire se passe demain, et se déroule sur trois jours à peine – » le jour du retour« ,  » le jour du tremblement » et  » le jour sans nom« – mais elle aurait presque pu se tenir il y a quelques semaines à peine, quand l’Europe battait une nouvelle fois ses records de température:  » Une vague de chaleur ravage les villes d’Europe centrale et du Sud. (…) La chaleur étouffante provoque des maux de tête et altère la respiration. Les personnes âgées et les nourrissons ne sont plus les seules victimes. On compte déjà des centaines de morts par déshydratation ou brûlés dans les incendies qui se multiplient. » Dans cette ambiance étouffante, Marika, 37 ans, emmène son fils à Berlin rencontrer son père pour la première fois. Des retrouvailles qui seront brèves:  » À environ 600 kilomètres de Berlin, au bord du Laacher See, le lac de Laach, tout près des frontières belge et luxembourgeoise« , un volcan vient de se réveiller et répand déjà ses cendres sur Berlin.  » Les cendres collent au visage comme de la terre. Les corps avancent avec lourdeur sous cette pluie grise. Un soleil de cendres gèle la ville. » Et soudain,  » la terre a tremblé. Avec une magnitude de plus de 7,1 sur l’échelle de Richter, le sol a vibré pendant vingt secondes. Rien. Une éternité. La ville a mugi de douleur et s’est déchirée dans un cri dégueulasse, un cri de mort, grave, qui remonte du plus profond, du plus loin, du ventre de la terre« . Le tremblement de terre a ouvert Berlin en deux, et séparé une mère de son fils, emprisonné dans les décombres du métro avec son père, cet inconnu. Viendra alors la quête, tragique, à la fois spectaculaire et intimiste, et ce  » jour sans nom » qui va, comme chez Cormac McCarthy et sa Route voir les Hommes se transformer en Bêtes, et, cette fois, une mère devenir héroïne.

La Route de Berlin

Apocalypse et poésie

Jeune quarantenaire dont ce n’est ici que le deuxième roman après À Paris coule la mer du Nord, la Française Astrid Monet -qui a vécu douze ans comme comédienne à Berlin, et connaît donc la ville comme sa poche- sera d’évidence un des noms qui surnagera dans cette rentrée saturée, tant son premier roman chez Agullo impressionne par sa force et sa liberté, elle qui ose mettre de la poésie dans sa tragédie post-apocalyptique en invoquant par exemple une Marlene Dietrich devenue ange (Wim Wenders appréciera). Surtout, elle offre au final un magnifique portrait de femme qui avait jusque-là toujours  » lâcher prise face aux enclumes de la vie« , et qui déjoue tous les pronostics de lecture. Un imaginaire féminin assumé, une ambiance à la fois contemporaine et de fin du monde, un récit complètement « trans-genre »… Soleil de cendres est aussi aux confluents des grandes tendances de cette rentrée. Raison de plus pour ne pas passer à côté.

Soleil de cendres

D’Astrid Monet, éditions Agullo, 210 pages.

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