Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

Avec son complice DJ Cosymozzy, Lorenzo Serra a inventé le DirtyDancing pour que Bruxelles ne danse pas idiot.

Depuis l’automne 2003, au Mirano, légendaire boîte proche de la place Madou à Bruxelles, à raison de quarante-six soirées annuelles, le concept du DirtyDancing installe son samedi soir loin de la monotonie des séquenceurs vulgaires. Le DD se pratique à l’oreille, colle au corps et offre aussi des nourritures visuelles – projections, expos, performances – généralement absentes des bouates à bouger.  » Mon premier disque était Kraftwerk, la pochette jaune, l’ordinateur, je suis tombé dans l’électronique tout petit, mais j’ai aussi été nourri de new wave. » Dans un café nouvellement branché de la Place Flagey, Lorenzo Serra ( à gauche sur la photo) vient de définir les deux pôles de son imaginaire musical et le syndrome de l’éclectisme majeur de Dirty- Dancing. Une autre façon de danser. Evoquant davantage un peintre du quattrocento qu’un nightclubber indélébile, Lorenzo, fin de la trentaine, porte en lui deux facteurs transmissibles: la sympathie et le désir de donner à la musique la place qui lui revient. La plus belle donc.  » On est dans une génération de zappeurs qui, musicalement, passent sans problème de Nirvana à Laurent Garnier: on a voulu traduire cette diversification et découvrir tout ce qui peut se passer en dehors du Top 50 pratiqué par les radios formatées. »

Frauder les genres

Dans ce désir, il y a aussi la volonté plus ou moins consciente de renouer avec les glorieuses années 80 où le dance floor est partenaire des arts plastiques et d’autres formes d’expressions. Ombres flamboyantes des « discothèques new-yorkaises à la Studio 54 ou possible référence au Palace parisien des grandes folies: décompartimenter, oser, frauder les genres. Au Dirty, on croise donc des défilés, des expos, des concerts de la nouvelle jeunesse rock via Danse bordel, c’est du belge! et les noms qui font tripper le vieux binaire – Vismets, Mud Flow ou Montevideo. Ces derniers, par exemple, symbolisent bien la passerelle rock-électro via le chanteur-instrumentiste Jean qui double son groupe par un parcours de DJ convaincu. On le trouve souvent au DD, partageant les soirées du résident numéro un, Cosymozzy ( à droite sur la photo).  » La première fois que j’ai vu un de ses sets, il devait avoir à peine dix-huit ans, mélangeait les styles et j’ai pris une raclée. »

Une décennie plus tard, Lorenzo plane toujours aux sets de son complice et alter ego Renaud Cosymozzy Deru, sorte d’anti-David Guetta, loin du marketing des grand-messes sur beats convenus. Alors que les prix des DJ flambent – de 1 000 à 10 000 euros plus frais -, le DD revendique toujours son indépendance créative. Pour la nuit de la Saint-Sylvestre, Lorenzo ressort de son brainstorming sur une année plus déchirée par la crise que par les dance floors, par un slogan anti-anxiogène: Je suis fantastique. C’est celui qui le dit qui l’est.

DirtyDancing au Mirano Continental, 38 chaussée de Louvain, 1210 Bruxelles, tous les samedis soirs (sauf en été) et le 31 décembre.

www.dirtydancing.be

Philippe Cornet

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