Kinshasa jusqu’au cou

De Anjan Sundaram, éditions Marchialy, traduit de l’anglais (Inde) par Charles Bonnot, 352 pages.

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Après Tokyo et New York, les éditions Marchialy poursuivent leur exploration souterraine des mégalopoles du monde. Cap cette fois-ci sur le Congo dans les pas d’un Indien décidant sur un coup de tête en 2005 d’abandonner de brillantes études en mathématique dans une université américaine pour aller tenter sa chance comme journaliste à Kinshasa. Et voilà comment Anjan Sundaram atterrit à Bozene, quartier populaire périphérique et fief de la contestation à Kabila Jr, qui s’apprête à affronter l’opposant historique Jean-Pierre Bemba lors d’élections présidentielles sous haute tension. Tout défie ici l’entendement: de la solidarité vorace, qui voit le moins pauvre se faire dépouiller par son entourage, au système de transport anarchique. Déterminé, le jeune pigiste tente de comprendre plutôt que de juger, convoquant l’Histoire pour expliquer notamment cette nostalgie perverse « qui détruisait l’estime des Congolais en même temps qu’elle les réconfortait ». Après une expédition dans la jungle à la recherche de gisements exploités illégalement par les Américains, il file dans l’Est du pays, là où les milices sèment la terreur. Le récit prend alors une texture anxiogène alimentée par l’attente, les rumeurs et l’ennui. Une virée au coeur des ténèbres qui culminera dans la rencontre avec un seigneur de la guerre. Au fil des pages s’esquisse le portrait d’un pays certes attachant mais dérivant inexorablement vers l’abîme, comme rendu fou par son passé colonial, ses dépeceurs et ses richesses convoitées de toutes parts. Suffocant.

L.R.

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