Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Retiens la nuit – La tribu Followill délaisse un peu son côté roots rock sudiste pour viser le stade. Pari réussi.

« Only By The Night »

Distribué par Sony.

Au départ, il y avait le retour du rock. C’était au début des années 2000, le come-back du perfecto, des lunettes noires, des poses sexy, les Strokes à New York, les White Stripes depuis Detroit. Et puis aussi, les Kings of Leon, versant sudiste et péquenot du rock qui tache, avec leurs barbes fournies et leur look de redneck. Le groupe est formé des trois frères Followill et de leur cousin. Quand leur premier album sort en 2003, le cadet, Jared, n’a que 17 ans… Avant ça, les frangins se sont notamment produits dans des rodéos. Ils ont surtout pas mal bourlingué dans le sud profond, baladés pendant toute leur enfance par leur père, prêtre itinérant pentecôtiste. A vrai dire, le scénario était presque trop beau pour être vrai. La bible dans une main, la bouteille de bourbon dans l’autre: cela peut encore être un résumé acceptable du rock, tel qu’il est né il y a 50 ans en terre américaine. Avouons-le, l’image des Kings of Leon a ainsi longtemps pris le pas sur leurs chansons, au moins en partie.

Stade

En 2008 cependant, les choses ont bien changé. Les cheveux ont été coupés, les barbes rasées ou presque. Presque propres les Kings of Leon, belles gueules même, à placer dans un prochain catalogue H&M. Mais il n’y a pas que ça. La musique de la tribu Followill est également en train de prendre un tour que l’on n’attendait pas forcément. Le précédent album, Because of the Times, sorti il y a un an à peine, avait déjà donné quelques indices. Son successeur, quatrième disque du groupe, intitulé Only by the Night, confirme: non, les Kings of Leon ne seront pas les Allman Brothers des années 2000.

Alors quoi? La démarche peut surprendre, les Kings of Leon ouvrant leur jeu au maximum. Le single, Sex On Fire, par exemple. Si ce n’est les paroles plutôt explicites, il donne l’impression d’être tout droit sorti d’un film des années 80 ( Top Gun? Footloose?). Ce n’est pas un compliment? Peut-être, mais force est de constater que le morceau fonctionne à merveille. La chanson suivante, Use Somebody, est encore plus étonnante, les Kings of Leon se prenant pour Coldplay ou les Killers. C’est certain: les séries télés vont se ruer dessus (on a toujours besoin d’une telle chanson, quand le garçon finit par se rendre compte qu’il a solidement foiré et se met à courir après la fille avant que celle-ci n’ait quitté la ville). Le fait est que, ce faisant, les Kings of Leon se préparent ni plus ni moins à attaquer les grands espaces. D’ailleurs, n’est-ce pas la guitare de The Edge de U2, le prototype même du groupe de stade, que l’on entend sur un titre comme Be Somebody? C’est flagrant, et pourrait valoir quelques solides procès en égarement auprès des fans des rouflaquettes et chemises à carreaux de la première heure. Pourtant, on peut les rassurer, le sud est encore là. Ne serait-ce que par certains accents mélodiques et surtout la voix de Caleb Followill. En cela, les Kings of Leon sont restés fidèles à eux-mêmes.

En grandissant, un groupe cherche souvent à élargir sa perspective. Certains s’y perdent, d’autres prennent de l’envergure. En sortant ce qui pourrait bien être leur meilleur album jusqu’ici, les Kings of Leon ont clairement pris la seconde voie.

www.myspace.com/kingsofleon

Laurent Hoebrechts

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