Vincent Genot
Vincent Genot Rédacteur en chef adjoint Newsroom

Cette année, le monde commémore les 90 ans de la fin de la guerre 14-18. Un devoir de mémoire que l’on retrouve dans les cases de BD.

Hugo Pratt, à qui l’on a quelquefois reproché de dessiner des histoires trop militaristes, s’est souvent défendu en expliquant que le jour où les uniformes apporteraient moins de prestige aux soldats, il y aurait probablement moins d’hommes pour faire les guerres. Et d’embrayer en constatant que les guerres offrent une trame particulièrement riche pour développer des récits. Ainsi dans la série Corto Maltese, qui a souvent le premier conflit mondial comme fond historique, le dessinateur italien montre une guerre dans laquelle il n’y a pas de bons, pas de méchants. Juste un système qui dépasse des soldats occupés à survivre. Certains hommes montent à l’assaut avec des camarades qu’ils trouvent stupides pour aller étriper des ennemis avec qui ils partagent de nombreuses valeurs. Si l’héroïsme et le romantisme sont de mise avec Pratt, l’absurdité de la guerre suinte à chaque page.

Réaliste comme l’étal d’un boucher

Quand il dessine la guerre 14-18, Jacques Tardi ne se préoccupe pas de gloriole ni d’héroïsme, au contraire, il les rejette. Sorti il y a 15 ans, son album C’était la Guerre des tranchées est une véritable charge contre l’image romancée des conflits. Plongé avec les poilus dans le cloaque mondial, le lecteur ne peut ressortir de cette histoire que dégouté et choqué. Le dessin et les textes ne tendent que vers une seule question: comment des hommes ont-ils pu supporter et survivre à une telle boucherie? Cette interrogation, Tardi la poursuit dans Journal de guerre, un nouveau projet dans lequel il évoque le premier conflit mondial par le biais du quotidien des hommes qui s’y sont affrontés et entretués. Un récit de fiction dans lequel le souci de véracité et la rigueur de la reconstitution historique occupent une place primordiale. Le conflit débute en couleurs, mais au fil de sa progression chronologique et à mesure que la guerre s’enlise, le dessinateur adopte les tonalités de plus en plus monochromes de la boue et de la grisaille. Avant d’être proposé en librairie en album (fin octobre), ce nouveau témoignage fait l’objet d’une prépublication sous forme d’un journal grand format, à raison de trois numéros de vingt pages chacun. Chaque numéro du journal, centré par ordre chronologique sur l’une des années de la période 1914-1916, comporte quinze pages de bande dessinée suivies de cinq pages de textes et d’articles, consacrés à l’actualité de la période. Comme pour C’était la Guerre des tranchées, l’ensemble de ces textes est signé de l’historien Jean-Pierre Verney, qui assure depuis des années, aux côtés du dessinateur, le travail de documentation.

Vincent Genot

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