Hors-saison

Au fil des albums de James Sturm se dessine le portrait d’une Amérique en perdition. L’auteur fait cette fois la chronique d’un couple qui se délite sur fond de la dernière campagne électorale qui opposa, en 2016, le mauvais au pire. Mark, un col bleu qui travaille dans le bâtiment, est dégouté par l’abandon de Bernie Sanders: il va devoir choisir entre Clinton qu’il déteste parce que  » c’est juste un peu plus la même vieille merde » et Trump « une machine à connerie ambulante« . Lisa, son ex, est bénévole pour le compte d’Hillary, ce qui n’adoucit en rien leurs rapports. Ils se sont séparés car leur vie n’est plus rythmée que par les engueulades du soir. Ils se partagent la garde des enfants qui, à cinq et huit ans, n’arrêtent pas de comparer la vie de papa à celle de maman. Pendant que Mark court après le fric que lui doit son associé/patron/enculé qui lui ramène des chantier, Lisa le harcèle pour qu’il ne donne pas trop de sucre aux enfants le soir mais insiste pour qu’ils regardent les débats télévisés des candidats pour éveiller leur conscience politique (!). Hors-saison ne raconte pas l’Amérique du bas, mais juste celle du milieu, qui tente de maintenir la tête hors de l’eau. En une série de petits tableaux, James Sturm raconte cette vie où toute joie a disparu, où le quotidien n’est plus qu’un combat à peine adouci par les retransmissions de matchs de football à la télé. On sait l’Amérique bigote, mais même les grâces rendues à Thanksgiving ont le goût nostalgique d’un passé révolu. On l’aura compris, Hors-saison n’est pas une lecture très réjouissante. On le classera pourtant du côté de l’excellent film Marriage story où, à l’instar des protagonistes du film, Mark et Lisa ont du respect l’un pour l’autre mais où, noyés dans leurs soucis et le nez dans le guidon, ils ne peuvent plus que foncer tête baissée dans le mur.

Hors-saison

De James Sturm, éditions Delcourt, 216 pages.

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