Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Sortez covers – Les années 80 fournissent la matière de deux albums de reprises par des spécialistes du genre. Cocasse.

Distribué par Pias. En concert le 18/10, au Petrol, à Anvers.

Señor Coconut « Around The World »

Distribué par Pias.

Un jour, il faudra se lancer dans une histoire de la reprise. Autant rassurer les éventuels candidats: l’£uvre ne devrait pas être titanesque, le concept étant finalement assez récent. Y avait-il quelqu’un par exemple pour signaler qu’Elvis Presley ne faisait « que » reprendre un morceau d’Arthur Big Boy Crudup, quand il balançait That’s Alright Mama?

Aujourd’hui, la reprise est assumée. Mieux: en notre belle époque post-moderne, l’exercice est même devenu un genre en soi. Avec ce précepte libertaire: au plus la seconde version se dévergonde, au plus elle risque de décoller. C’est en tout cas l’option prise par le Français Marc Collin – principal maître d’£uvre du projet Nouvelle Vague -, et par Señor Coconut, alias l’Allemand Uwe Schmidt, installé au Chili depuis le milieu des années 90. Les deux sortent une nouvelle série de relectures de standards pop. A leur sauce évidemment.

Second degré

Avec Nouvelle Vague, Collin a déjà sorti deux premiers disques qui reprenaient des titres culte de la new wave façon bossa nova. Deux albums franchement réussis, s’attaquant à des titres comme Love Will Tear Us Apart de Joy Division, ou le Blue Monday de New Order. Cette fois-ci, Collin change (un peu) son fusil d’épaule. Rebaptisé pour l’occasion Hollywood, Mon Amour, il s’est braqué sur des tubes tirés de B.O. de films des années 80, le tout toujours passé à la moulinette vaguement lounge-bossa-pop et chanté par un casting entièrement féminin. La liste des morceaux peut faire franchement peur. De Eye of the Tiger (Rocky III) à View To A Kill (le James Bond de 1985, par Duran Duran), en passant par Reality (oui, on parle bien de la guimauve de la Boum)… Toute ironie mise de côté, l’exercice entend faire redécouvrir les qualités mélodiques de ces insubmersibles scies. Au bout du compte, le crapaud ne se change pas en prince à chaque fois. Mais il est en effet troublant, voire touchant, d’entendre par exemple le tournant dramatique que prend What A Feeling (Flashdance) chanté par Yael Naïm, ou de voir la Brésilienne Cibelle sautiller sur Footloose. Qui l’eût cru?

De son côté, Señor Coconut réactive sa machine à danser latino. Curieusement, lui aussi se concentre sur un répertoire majoritairement pêché dans les années 80. Après avoir donné des versions rumba, merengue, ou cha cha cha de titres de Kraftwerk, des Doors, ou Michael Jackson, Uwe Schmidt aligne ici des reprises de Prince, Eurythmics, et même Telex ( Moscow Discow). Daft Punk est également de la partie, tout comme le Corcovado de Jobim. Contrairement à Nouvelle Vague, le sourcil sarcastique est ici de rigueur, et le kitsch féroce complètement assumé. Cela dit, l’exercice est à nouveau assez bien balancé pour dépasser le stade de la simple blague.

Evidemment, dans un cas comme dans l’autre, la démarche devient trop systématique pour surprendre encore. Et comme les chansons sont souvent déjà connues… Les blagues les plus courtes sont les meilleures? Peut-être. Mais une fois la panoplie de critique remise au placard, avouons-le, il n’est pas certain qu’on se permettra de bouder son plaisir. Puisque c’est bien de cela qu’il s’agit…

www.myspace.com/hollywoodmonamour

www.senor-coconut.com

Laurent Hoebrechts

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