Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

Clint, éternel justicier – À 78 ans, Clint Eastwood s’offre – non sans humour – un personnage d’homme d’action, protecteur des faibles et capable de racheter ses erreurs passées. Du cousu main!

De Clint Eastwood. Avec Clint Eastwood, Bee Vanh, Ahney Her. 1 h 57. Sortie 25/02.Ne l’appelez pas Walt, mais Monsieur Kowalski. Même le jeune curé qui vient de célébrer les funérailles de son épouse aimée doit l’appeler ainsi. Et quant à se confesser?! L’insistance du prêtre ne saurait avoir de prise sur le septuagénaire bourru, grommelant sa désapprobation du monde extérieur avec une moue carnassière. Walt, pardon, Monsieur Kowalski, n’aimait que sa femme tout juste disparue. Il tolère à peine ses deux fils gras et mous, et réprouve les piercings de sa nièce adolescente. Xénophobe et raciste, il n’aime pas non plus tous ces Asiatiques qui sont venus habiter son quartier, et n’entretiennent même pas leur pelouse. Que lui rappellent-ils de son passé militaire, quand il fit la guerre de Corée, ramenant des souvenirs terribles qu’il préfère taire aujourd’hui? Par un concours de circonstances qu’on ne dévoilera pas ici, ces voisins aux yeux bridés vont avoir sur la vie de cet homme amer, aigri, une influence salutaire. Au point de pouvoir l’appeler Walt. Au point aussi, peut-être, de lui faire retrouver, in extremis, un sens à sa vie…

un humour vachard

Curieux mais très efficace mélange de film d’action, de drame psychologique et de comédie au second degré, Gran Torino prend pour titre le modèle de la voiture Ford « vintage » que Walt (appelons-le ainsi désormais) garde dans son garage. Masquant sous des traits d’humour volontiers vachards une thématique au fond des plus sérieuses, le film offre à son acteur-réalisateur l’occasion de réendosser simultanément un double personnage omniprésent dans sa filmographie. Celui du justicier armé, affrontant l’ennemi sans faiblesse, et celui de l’homme hanté par un sombre et violent passé qui le mine, et dont il pourrait – ou non – obtenir la rédemption au terme du récit. A 78 ans, Clint peut donc encore, de manière crédible, épauler un fusil, dégainer un pistolet, et expédier avec ses poings quelques directs dévastateurs, rendant coup pour coup aux méchants de service. En même temps, il sait aussi, le temps venu, substituer à la seule logique de la force, de « l’£il pour £il dent pour dent », celle de l’intelligence, du c£ur et du sacrifice de soi. Un cumul somme toute assez fascinant, qu’Eastwood le prolifique nous emballe avec grâce dans un film plus significatif qu’il n’y pourrait paraître à première vue. Son portrait d’un Américain patriote (la bannière étoilée flotte sur le porche de sa maison), réactionnaire et fermé à la différence, qui s’ouvre progressivement à l’autre sous la forme d’une famille originaire d’Asie, s’inscrit – volontairement ou non – en plein dans l’élan du « vivre ensemble » cher à un certain Barack Obama…

www.thegrantorino.com

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