Louis Danvers
Louis Danvers Journaliste cinéma

De Matteo Garrone. Avec Salvatore Abruzzese, Gianfelice Imparato, Maria Nazionale. 2 h 10. Home Screen.

Le jeu de mot du titre évoque simultanément la Camorra, cette implacable et tentaculaire mafia napolitaine, et la ville en perdition de l’Ancien Testament Gomorre, que la colère divine menace de destruction. Et dès la première séquence du film, le ton est donné. Dans un centre de bien-être où quelques durs de durs viennent se chauffer aux UV ou se relaxer au sauna, quelques tueurs entrés discrètement les massacrent un à un sans ciller. Un règlement de compte sauvage et sanglant, qui en appelle d’autres…

Nous sommes donc à Naples, au c£ur d’un empire criminel où la Camorra étend sa main brutale. Des caïds aux petits soldats, des puissants décideurs aux veuves que l’organisation soutient à coups d’aides financières, pour qu’elles restent discrètes. Et là où l’argent ne suffit pas à corrompre, à intimider, la violence prend le relais, faisant taire définitivement celle ou celui qui penserait à défier l’omerta, le silence complice.

Gomorra s’inspire d’une enquête journalistique serrée, menée – à ses risques et périls – par le journaliste-écrivain Roberto Saviano. Du livre best-seller touffu relatant ces investigations, le réalisateur Matteo Garrone a retenu quelques personnages et situations dont il nourrit son film, une fiction très documentée et à l’impact dévastateur. A travers les destins croisés de camorristes de tout poil et de toute envergure, c’est tout un système qui se retrouve exposé dans ce qu’il peut avoir de plus tentaculaire, féroce et destructeur. Ce film coup de poing a obtenu le Grand Prix du dernier Festival de Cannes. S’il est souvent violent, il est aussi et surtout pertinent. L’£uvre forte et salutaire de Matteo Garrone paraît en DVD dans une remarquable édition « prestige » de deux disques, dont le second est consacré à de passionnants bonus. On y trouve notamment un long et très éclairant entretien avec Roberto Saviano, l’homme dont le travail d’enquête aussi minutieux qu’abondant a offert sa terrifiante matière au film. Des scènes coupées y figurent aussi, et un documentaire sur les coulisses du tournage apporte de nombreuses informations complémentaires.

Détail amusant, un texte sur la couverture célèbre le fait que Gomorra soit le « gagneur » de cinq prix européens, alors que c’est « gagnant » ou « vainqueur » qu’il aurait fallu écrire. Une traduction de « winner » par une société néerlandaise dont le souci du bon français n’est pas une priorité… Rien heureusement qui vienne réduire l’intérêt d’un coffret bien fait et bien complet, restituant dans toute sa force un film qu’il convient par ailleurs de ne pas placer sous des yeux trop jeunes, tant la violence qui s’y déchaîne a de quoi impressionner… l

Louis Danvers

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content