22.55 LA DEUX
DE SYLVIE ANTONIO BONSANGUE.
V olontaire. On pense à cette indémodable chanson du même nom de Bashung, présente en 82 sur l’album Play Blessures et qui, à sa façon toute singulière, aurait pu servir de bande-son parfaite à ces déambulations dans les couloirs des cliniques universitaires de Saint-Luc à Bruxelles: » Emotions censurées / J’en ai plein le container / Je m’accroche aux cendriers / M’arrange pas les maxillaires / Section rythmique, section de combat / Effets secondaires / C’est quelles séquelles / C’est tout ce qui me reste de caractère. » Point de velléités fugitives pourtant ici, dans ce quotidien clinique vécu au travers d’une poignée de personnes aidantes et volontaires. Point de place pour la musique, surtout, dans ce film aux options radicales et, en un sens, modernes: se refusant à tout ajout d’ordre extra-diégétique (pas de voix-off, aucun commentaire explicatif, absence totale de musique extérieure à l’action), la réalisatrice Sylvie Antonio Bonsangue choisit de se passer également du classique recours à des témoignages en face caméra, préférant s’en tenir à enregistrer le plus fidèlement possible la réalité brute de ce travail bénévole.
INABOUTI
Options formelles louables à priori mais dont on ne cesse de questionner la pertinence tandis que défile le document. Car si la réalisatrice se refuse à imposer un sens au téléspectateur, au final son film n’en manque pas moins cruellement. De sens et de point de vue d’ailleurs. Ce Volontaire ne trouvant jamais l’équilibre entre une foultitude de moments disparates et anodins saisis sur le vif et quelques maigres instants où la caméra touche, enfin, à une certaine force de vérité. Il y a bien cette figure attachante qui se détache de l’ensemble: Louise, une bénévole passant en peu de temps de volontaire à patiente. Une sorte d’aveu d’impuissance assez parlant, aussi, sur la fin du film. Mais c’est surtout l’aspect inabouti voire incohérent de la chose que l’on retiendra. Il y a par exemple cette pudeur quand Louise se rend, à plusieurs reprises, dans la chambre de Laurent, un homme que l’on devine encore jeune et qui se trouve en soins palliatifs: la caméra reste dans le couloir et n’enregistre que les échanges verbaux émanant de la pièce. Pudeur étrangement absente, un peu plus loin, quand il s’agit de filmer longuement et de près un vieil homme en chaise roulante qui pleure la mort de son ami. Un document fragmenté qui ne manque pas de laisser un sentiment pour le moins mitigé.
Nicolas Clément
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