SON NOUVEAU FILM EN 3D THE HOUSE OF MAGIC EST UNE RÉUSSITE. AUTEURET ENTREPRENEUR, BEN STASSEN VOIT CLAIR DANS L’UNIVERS DU RELIEF.

Le silence régnant dans les vastes locaux de nWave est impressionnant. Les postes de travail sont presque tous occupés, les grands écrans d’ordinateur affichent le travail en cours, mais on entendrait voler une mouche… comme celles du premier long métrage de Ben Stassen Fly Me To the Moon. Nous sommes dans le bas de Forest, à quelques encablures du Wiels, dans un quartier cosmopolite. C’est là que le réalisateur et entrepreneur belge a installé sa société de pointe dans le domaine de la création digitale. Il nous reçoit pour évoquer, avec son coréalisateur Jeremy Degruson, un nouveau film spectaculaire en diable: The House Of Magic. Une histoire de chaton abandonné découvrant l’univers étonnant d’une maison réputée hantée mais habitée de créatures en définitive bienveillantes. « A l’origine du film, il y a notre court métrage Haunted House, qu’ont déjà vu pas loin de… 100 millions de personnes à travers le monde(1) », explique un Stassen qui n’est pas tendre avec la manière dont la 3D est employée dans la plupart des films. « Le plus souvent, c’est nul de chez nul, carrément catastrophique, une source de déprime constante, clame-t-il. Y compris chez Pixar, même si je trouve leurs films fantastiques par ailleurs. La 3D ne vient qu’après, en post-production, elle n’est pas utilisée à la base comme outil créatif… Presque tous les films proposés en 3D sont en fait de la 2D et demie. On fait dépenser plus d’argent au spectateur qui se sent floué, et choisit ensuite d’aller voir les films 3D dans les salles qui les passent en 2D… »

Jaillissement

Et Ben Stassen de poursuivre, sur un ton passionné. « Au fond le relief c’est quoi? Quand on va dans une salle de cinéma, on éteint les lumières, on fait abstraction de l’environnement, on entre en immersion dans l’histoire. Une immersion intellectuelle et émotionnelle. Le relief permet d’ajouter un troisième niveau: celui de l’immersion physique. Dans Fly Me To the Moon et dans les deux Sammy(Le Voyage extraordinaire de Sammy et Sammy 2, sortis en 2010 et 2012, ndlr), nous avions joué cette carte de l’immersion, sans presque utiliser le jaillissement, trop vite gadget et bon marché. Avec The House Of Magic, nous avons voulu ajouter le jaillissement, ludique mais toujours intégré dans la narration. » Un parti pris exubérant, jubilatoire, où offrir du plaisir est la priorité, « et où le spectateur découvre le monde à travers les yeux d’un chat, en anticipant les sensations que la vision 3D seule peut faire partager« , précise Jeremy Degruson, directeur artistique de Fly Me To the Moon.

Dans la dynamique présente chez nWave, même les contraintes budgétaires peuvent se transformer en atouts. Comme quand l’obligation de renoncer à quelques scènes de rue permettent de concentrer l’action dans la maison et ses alentours immédiats, créant une dynamique de lieu unique exploré à fond. Ou quand l’abandon de l’idée de faire parler tous les personnages, jouets y compris, donne à ces derniers, restés muets, un supplément de mystère et de poésie… D’autres inspirations ne coûtant rien, comme celle de faire ressembler le vilain neveu nerveux, pressé de vendre la maison de son vieil oncle généreux, à « un mélange de Jean-Marie Messier et de Nicolas Sarkozy » éminemment savoureux. Ou le clin d’oeil à un classique de Disney (Oliver & Company)avec le Doberman poursuivant le chaton jusqu’à la grille de l’étrange demeure.

The House Of Magic sort dans un contexte de marché qui a spectaculairement évolué ces dernières années. « Quand nous avons commencé, en 2005, il n’y avait au total que treize films d’animation en images de synthèse qui avaient été produits, le premier étant Toy Story en 1996, constate Ben Stassen, aujourd’hui il en sort 20 par an! Ce qui est beaucoup trop, car il y a trop peu de fenêtres propices au cinéma d’animation: Pâques, Carnaval et Thanksgiving aux Etats-Unis, c’est à peu près tout… »

Stassen annonce « la fin de la 3D dans cinq ans si on ne passe pas à 48 images seconde… A 24 images seconde, les limitations sont trop grandes. Les scènes d’action, vous pouvez enlever les lunettes pour les regarder. Elles sont en 2D, pour éviter l’effet de strobing qui, quand il y a beaucoup de mouvement en 3D, vous donne la nausée. Peter Jackson et son Hobbit à 48 images seconde ont montré, l’an passé, la voie à suivre. A 48 images seconde (c’est-à-dire avec quatre fois plus de temps de calcul par image que la 3D habituelle, et seize fois plus que la 2D!), vous pouvez offrir de l’action en vrai relief. La vraie révolution du relief, ce n’est pas Avatar mais The Hobbit! » La clé, comme presque toujours, sera économique. « Hollywood n’a pas élu la 3D pour ses vertus créatives, conclut notre interlocuteur, mais parce que c’était l’argument massue pour convaincre les exploitants de s’équiper (à grand prix) en digital. Maintenant que c’est fait, Hollywood s’en fout et bâcle sa 3D. Mais avec les projecteurs 4K, on pourra montrer des films à 48 images seconde (comme Avatar 2) sans frais supplémentaires. Le seul avenir du relief est là! »

(1) PROJETÉ DANS DES SALLES ÉQUIPÉES EN… 4D, HAUNTED HOUSE FIT ET FAIT ENCORE LES BEAUX JOURS DE PARCS D’ATTRACTION COMME BOBBEJAANLAND ET PLUS RÉCEMMENT LE PARC ASTÉRIX.

THE HOUSE OF MAGIC DE BEN STASSEN, JEREMY DEGRUSON. 1 H 22.

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