SCÉNARISTE, ACTRICE ET RÉALISATRICE DE THE FUTURE, ELLE EST AUSSI MUSICIENNE, ÉCRIVAINE ET PERFORMANCE ARTIST. AVEC UN MÊME BONHEUR DE CRÉER ET DE PARTAGER.

Il en est qu’elle irrite, Miranda. Les multiples talents de ce petit bout de femme, ses allures de première de classe, section arts indépendants, ses candeurs prises parfois pour de la pose, font beaucoup pour l’anti-intello de base, un peu misogyne sur les bords. July de son pseudo (elle est née Miranda Grossinger), cette fille d’écrivains élevée à Berkeley et vivant à L.A. fait flèche de tout bois. Quand elle ne signe pas des performances et des installations multimédia, elle écrit des livres (1) et réalise des films, dont le premier, Me And You And Everyone We Know, lui a valu la Caméra d’Or au Festival de Cannes en 2005. Son deuxième long métrage, The Future, confirme l’originalité de sa trajectoire.

Quelle différence ressentez-vous entre le processus d’écriture d’un film et vos autres activités créatives?

Quand j’écris un film, j’ai l’impression de ne rien faire ( rire)! Des idées me viennent spontanément, je les note, et peu à peu elles se lient et prennent une forme différente. Je reviens bien sûr à ce que j’ai écrit, je revois le script. Mais ce dernier reste une chose en soi, qui avance presque toute seule. Et qui se nourrit d’autres choses que je fais ou écris. C’est un processus poreux, perméable. Une performance que j’avais réalisée auparavant s’est par exemple infiltrée dans The Future. Une performance dont j’avais initialement voulu faire une nouvelle… mais sans parvenir à l’écrire ( rire)!

The Future commence de manière amusante, puis devient de plus en plus triste et mélancolique…

L’humour m’accompagne toujours, même quand j’écris quelque chose de triste. Comme s’il voulait me retenir sur la pente… Mais parfois, je me résous à la descendre, cette pente. Et à juste être triste. J’ai voulu, avec ce film, voir si je pouvais suivre la voie de la mélancolie en laissant l’humour derrière moi. Je ne savais pas, au départ, si j’en serais capable. On rit bien quelques fois, dans la deuxième partie du film, mais c’est en effet de plus en plus triste…

The Future chronique la vie d’un couple somme toute assez ordinaire. Et pourtant tout y apparaît singulier…

La situation de départ relève du cliché. Mais les sentiments qui s’expriment s’en échappent. Le fait de parler d’une situation a priori banale, de me plonger dans la normalité, m’a paradoxalement permis de prendre plus de risques dans la manière de raconter. Une histoire plus bizarre ne m’aurait pas donné cette liberté de tenter des décalages. Au plus les choses sont normales en apparence, au plus petit le décalage peut être, qui fait tout apercevoir sous un jour différent.

Six ans entre vos 2 films, c’est un peu long, non?

J’avais tellement de choses à faire, tellement de choses dont j’avais trop envie, tellement de choses entreprises que je voulais finir (comme mon livre). Et il y aura aussi pas mal de temps avant le prochain film ( rire)! Je viens de commencer un nouveau roman, j’ai plein de projets multimédia. Et puis je vis ma vie, qui nourrira tout le reste, film y compris…

On vous dit parfois hyperactive…

( rire) Je crois être, en fait, une paresseuse hyper-productive! Il y a quelque chose en moi qui me dit que si j’en fais assez maintenant, je pourrai me reposer plus tard. Bien sûr, je doute que ce moment arrive de sitôt ( rire)… Je doute encore plus d’en avoir vraiment envie… Je veille juste à prendre des courtes périodes « off », où je ne fais rien d’autre que traîner à la maison. Mais avec un mari qui est aussi réalisateur (2), ce n’est pas évident…

Un des thèmes de The Future est le temps. Quelle est votre propre relation au temps?

Comme tout le monde, je me dis parfois qu’il passe bien trop vite, et que je ne l’utilise pas assez efficacement. Mais quand je regarde en arrière, je trouve que j’ai été bien assez productive, au fond. Globalement, j’ai un rapport assez cool, assez harmonieux, avec le passage du temps. Je ne le vois pas comme un ennemi qu’il faut combattre. Plutôt comme un flux, un courant qui invite à nager, à naviguer.

Un autre thème récurrent dans vos films est le rapport entre amour et humiliation…

Tomber amoureux, c’est souvent s’exposer à des moments embarrassants. Mes personnages peuvent paraître maladroits, mais je les trouve très audacieux, en fait. Il faut du courage, de l’audace, pour dévoiler ses sentiments et risquer l’humiliation. Mais comment vivre et aimer, si on n’a pas ce cran-là?

(1) UN BREF INSTANT DE ROMANTISME EST PARU CHEZ FLAMMARION.

(2) MIKE MILLS, LE TALENTUEUX AUTEUR DE THUMBSUCKER ET DU TOUT RÉCENT BEGINNERS.

RENCONTRE LOUIS DANVERS

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