AVEC RETROMANIA, SIMON REYNOLDS A PUBLIÉ L’UN DES LIVRES LES PLUS IMPORTANTS SUR LA CULTURE POP SORTIS CES DERNIÈRES ANNÉES. ENTRETIEN.

Comment est né Retromania?

Cela fait longtemps que je m’intéresse aux tendances rétro dans le rock. Mais vers 2006-2007, les choses se sont accélérées, et de plusieurs manières. J’ai réalisé à quel point l’industrie de la nostalgie des tournées de reformation a pris de l’importance. Le développement rapide de YouTube comme gigantesques archives collectives des vidéos pop et des clips télé a également attiré mon attention. Il y a eu aussi pas mal de musiques que j’aimais vraiment et qui était basées sur l’idée de mémoire ou de fantômes: Ariel Pink, le label Ghost Box label en Grande-Bretagne, et plein d’autres. Mais par dessus tout, j’étais préoccupé par le fait que l’innovation paraissait ralentir et que la nouveauté devenait plus difficile à trouver. Dans le courant des années 2000, on n’a pas vu la formation d’une musique ou d’une culture jeune majeure, du moins à l’échelle de mouvements comme le hip hop ou la techno-rave.

Selon vous, les nouvelles technologies ont encouragé la rétromania, dans le sens où elles ont donné accès à une masse infinie de musique. Au point de vous demander si la culture peut survivre à l’absence de limites…

Si vous regardez la plupart des innovations dans la musique populaire au cours de l’Histoire, vous constatez qu’elles se sont développées dans des communautés relativement isolées et fermées: le jazz à la Nouvelle Orléans, le reggae en Jamaïque, le hip hop dans le Bronx. Les influences extérieures existent, mais elles s’insèrent dans le système culturel et mutent drastiquement. Quand tout est connecté, de manière instantanée, inondant chacun avec les influences venues de partout (tout le temps)…, la « fermentation » culturelle ne peut pas se faire. Les transferts d’idées sont trop rapides, elles n’ont pas le temps de germer. Le cosmopolitisme peut produire des hybrides très cool, mais ils n’ont pas tendance à générer de réelles innovations majeures en termes de rythme, d’expression, etc.

La pop s’abreuve du passé, mais reste perpétuellement en quête de la nouvelle sensation, non?

C’est vrai, les gens veulent toujours écouter le dernier truc à la mode. Une tendance qui est nourrie par une énorme industrie du commentaire et des médias, sans compter la masse des amateurs qui commentent sur le Net. Mais la plupart du temps, ce qui me frappe, c’est que ces nouveaux groupes se limitent à de légers repackaging de choses déjà entendues. C’est une illusion de nouveauté qui n’est pas très satisfaisante, et en effet, la scène musicale de la dernière décennie est remplie de ces groupes qui ont connu la hype et le buzz pendant un an, avant d’être complètement oubliés, les gens étant passés à autre chose.

Les Stones Roses se reforment et repartent en tournée. Vous irez les voir?

Cela se pourrait. J’aimais vraiment le groupe à l’époque, et je les ai interviewés 2 fois. Ce sont vraiment des gens super, très intelligents, instruits, qui s’intéressent à la politique, l’histoire et l’art. Je pense qu’ils pourraient être une force positive sur la scène musicale.

u RETROMANIA, ÉDITIONS LE MOT ET LE RESTE, 480 PAGES. SORTIE LE 9 FÉVRIER.

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