Dr Elvis et Mr Parker

© Warner Bros. Pictures/AP

Austin Butler brille dans un film exubérant où Baz Luhrmann envisage le parcours d’Elvis Presley à travers les yeux du colonel Parker.

J’ai toujours été fasciné par la culture américaine. Si vous voulez explorer l’Amérique des années 50, 60 et 70, il vous faut Elvis. Il est à l’épicentre de la pop culture, le bon comme le moins bon, de ces périodes”, observe Baz Luhrmann dans le making of proposé en bonus Blu-ray d’Elvis. Pour retracer le parcours du King (Austin Butler), le réalisateur adopte un point de vue original, celui du colonel Tom Parker (Tom Hanks) (qui n’était pas plus colonel qu’il ne s’appelait Parker), individu à la réputation peu flatteuse qui fut son manager exclusif en plus d’être un escroc notoire. L’association entre The Showman & The Snowman, l’artiste et l’as de l’entourloupe, débute lorsque le second, doué d’un flair incontestable, voit le premier débouler sur la scène du Louisiana Hayride un jour de 1955. Voix, gestuelle, sex-appeal: l’Amérique n’a jamais vu ni entendu chose pareille, et Parker saura surfer sur l’onde de choc et le talent de sa trouvaille, le succès étant rapidement au rendez-vous. La suite -le service militaire en Allemagne, les films hollywoodiens plus ou moins ineptes, le show de Noël de la NBC en 1968, l’engagement à l’hôtel International de Las Vegas…- appartient à l’Histoire, la carrière d’Elvis épousant un arc narratif classique où, à l’irrésistible ascension succède l’inexorable déclin, sex & drugs & rock’n’roll. Une trajectoire à la Icare s’étant trop approché du soleil, sur laquelle la personnalité trouble de Parker serait venue jeter un voile d’ombre.

© National

Exubérance et flamboyance

De la musique, des paillettes et un destin qui se consume: le réalisateur de Gatsby et Moulin Rouge est à l’évidence dans son élément. S’il n’omet aucun passage obligé, Luhrmann évite cependant aussi bien les travers de la wikibiographie exhaustive que ceux du biopic classique. Exubérance du style, flamboyance de la reconstitution, des costumes et des décors, chansons à tomber, de Heartbreak Hotel à Suspicious Minds: son film est un tourbillon, happant le spectateur dans une débauche de glamour scintillant, comme pour mieux signifier l’impact ravageur que devait avoir le King dans le paysage changeant de l’Amérique puritaine, avant d’en devenir une icône absolue.

Au-delà du performer charismatique, c’est aussi la vérité de l’homme que s’emploie à débusquer le cinéaste, le “mama’s boy” et beaucoup d’autres choses encore. Austin Butler, transcendant l’imitation stérile, livre une interprétation en tous points brillante. Une manière aussi pour Luhrmann d’ausculter le rêve américain, cette chimère dont Elvis serait l’incarnation ultime, de la shotgun house de Tupelo à la démesure de Graceland. Non sans embrasser, dans un même élan, son revers…

Elvis

De Baz Luhrmann. Avec Austin Butler, Tom Hanks, Olivia DeJonge. 2 h 40. Dist: Warner.

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