LOIN DES GRANDES SURFACES, LES DISQUAIRES INDÉPENDANTS -UNE POIGNÉE À BRUXELLES ET EN WALLONIE- FONT DE LA RÉSISTANCE. CE QUI EN TERMES D’ÉLECTRICITÉ, S’AVÈRE PARFOIS PAYANT.

L’une des scènes mémorables d’Orange mécanique (Stanley Kubrick-1971) présente Alex DeLarge (Malcom McDowell), voyou désaxé et fan notoire du grand Ludwig Von, se rendant chez son disquaire récupérer un divin vinyle. Le psychopathe y emballe prestement deux nénettes sur la promesse de leur « faire entendre les trompettes des anges et les trombones du diable ». Ce que confirme la scène suivante, mix de culs nus sur charge triomphante de Beethoven. Le scénario 2012 donnerait quoi? « Voulez-vous boire un verre en partageant un fichier MP3? » Ou version street capitaliste: « Une virée au rayon disques de la Fnac ou de Media Markt, ça te dit chouchoute? » Depuis une décennie au moins, la grande distribution et l’avènement de la digitalisation musicale ont semblé couler définitivement les disquaires indépendants: pas rentables voire a priori ringards en comparaison de la technosphère dématérialisée ou les grandes surfaces. L’autre signe de déconfiture discographique vient en avril 2009 avec la fermeture du Virgin Megastore de Times Square, New York: le plus puissant magasin de disques au monde -55 millions de dollars de ventes annuelles…- a fini par céder sous le poids des coûts d’exploitation et du piratage numérique. Pour rappel, le Virgin de Bruxelles sera, dès le début des années 2000, voué au rachat puis à la disparition. En Belgique, les grands machins actuels, la Fnac ou Media Markt, survivent en faisant du profit autre que par le disque. La faillite du groupe Sonica (Extrazone) il y a trois ans, rappelle pourtant que la GBisation de la musique n’est pas gagnée. La chaîne hollandaise Free Record Shop -environ 80 boutiques chez nous- est essentiellement active en Flandres, laissant quelques branches en Wallonie sans toutefois dépasser le service minimum en termes d’offre, de diversité ou de conseil. Paradoxalement, la résurgence, pas forcément spectaculaire, du vinyle depuis une paire d’années, redonne aux disquaires indépendants un lustre que le « tout CD »semblait avoir anéanti. En repartant d’une offre-niche, le LPet toutes ses variations de luxe, mais aussi de ce fameux « service aux consommateurs » désertant les grosses machines -oseriez-vous déranger un vendeur Fnac?-, les disquaires indépendants semblent aujourd’hui condamnés à ne pas disparaître. Et ce, dans un étonnant pari Back To The Futurequi, en français mal intentionné, pourrait se traduire par Retour au passé…Quelques exemples de disquaires qui ne s’en foutent pas.

TEXTE PHILIPPE CORNET

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