Indigènes a fait de lui une authentique vedette. Mais Roschdy Zem, aujourd’hui en plein épanouissement, avait déjà marqué nos imaginations…

Le football a peut-être perdu un talent prometteur quand le jeune Roschdy Zem lui préféra le théâtre, son autre passion d’adolescent. Le cinéma, en tout cas, y a gagné un acteur formidable, dont la double actualité de Go Fast et de La Fille de Monaco lui permet d’exploser définitivement sur nos écrans. Dans le film d’Olivier Van Hoofstadt ( voir critique en encadré), Zem est aussi brillant qu’intense en flic risque-tout, infiltré dans une bande de trafiquants de drogue et fonçant à toute allure vers un destin méchamment compromis. Dans celui d’Anne Fontaine, et face à un Luchini au sommet de sa forme, il campe avec une retenue idéale un garde du corps amené à coller de trop près celui qu’il est censé protéger…

La méthode Zem

Deux rôles différents, deux styles presque opposés, pour la confirmation d’un large et fort registre.  » Ce qui est drôle, explique le comédien, c’est que j’ai d’abord tourné Go Fast avec toute une préparation physique éprouvante que nécessitait le personnage de Marek. Une semaine à peine après le tournage, je me retrouvais sur celui d’Anne Fontaine! Le personnage de Christophe dans La Fille de Monaco a profité de cette expérience que je venais de faire. Cela soulignait le côté absurde de cette fonction de garde du corps. Ce fut assez jouissif… »

Que ce soit dans un personnage extraverti ou dans un autre plus secret, la méthode Zem est identique:  » Jouer le plus sérieusement possible, dans lepolar comme dans la comédie. Les rôles changent, la méthode est la même! »

Celui qui vendait des jeans sur les marchés et n’osait pas penser au cinéma quand un assistant d’André Téchiné le repéra, a fait bien du chemin depuis le début des années 90 et ses petits rôles dans J’embrasse pas et Ma saison préférée. Il est trentenaire quand, après quelques emplois au théâtre, ses performances dans N’oublie pas que tu vas mourir de Xavier Beauvois et En avoir ou pas de Laetitia Masson le révèlent vraiment. Chéreau ( Ceux qui m’aiment prendront le train), Garrel et quelques autres réalisateurs marquants font appel à lui, appréciant son mélange de force athlétique et de profonde sensibilité.  » Le travail physique et l’émotionnel sont tout sauf opposés, commente l’acteur , ils se complètent et même se nourrissent l’un l’autre. Toute la préparation de Go Fast m’a par exemple permis d’exprimer plus sereinement les émotions vécues par l’inspecteur Marek… »

La révolution Indigènes

Fils d’immigrés marocains, on imagine le bonheur que Roschdy ressentit à l’heure du triomphe cannois d’ Indigènes, voici deux ans à peine.  » Au-delà de l’importance historique du sujet, qui était déjà énorme, ce film a provoqué une petite révolution dans le cinéma français, déclare-t-il, car pour la toute première fois on pouvait voir sur l’affiche quatre fils de maghrébins dans les premiers rôles, et que le succès tant public que critique fut au rendez-vous! Sans oublier le fait que l’impact du film a entraîné le vote d’une loi débloquant le versement des pensions des anciens combattants venus des ex-colonies… » Et de rappeler que  » personne ne croyaità Indigènes, personne ne voulait nous suivre, au départ. Il y avait tant de préjugés! Mais finalement, ce film a changé la donne. Désormais, un acteur arabe comme moi peut même, par exemple, incarner des personnages de Français non maghrébins comme le Christophe de La Fille de Monaco ».

La mode est au zapping

Il y a deux ans, Zem a réalisé un premier film, Mauvaise foi, où le métissage se voit célébré à travers un couple mixte juif-musulman, sur le ton de la comédie mais avec une claire volonté de dire non aux dérives identitaires, voire communautaristes.  » Pour l’avenir, je ne sais s’il faut se montrer optimiste ou pessimiste, conclut-il. Les choses évo-luent très vite dans notre société. Je me demande si les excès de communautarisme constatés ces dernières années ne sont pas en train de s’estomper, à la lumière de l’échec des pays qui ont choisi cette voie (l’Angleterre, les Etats-Unis). Mais tout va si vite, désormais. Il y a un an, tout le monde était pro-Sarkozy, maintenant tout le monde est anti-Sarkozy. La mode est au zapping que ce soit dans la politique ou dans la culture… » Une chose est sûre, néanmoins, le cinéma français ne pourra plus zapper Roschdy Zem!

Rencontre Louis Danvers

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