De Blueberry à l’Incal

Pop’philosophie? Malgré les efforts méritoires de nombreux penseurs et penseuses, le mot continue à puer. L’idée que la philosophie aurait quoi que ce soit de « grand » à apprendre des intensités propres à la pop culture demeure une sorte de dossier en friche, dans lequel s’égarent les passionnés solitaires. Jean-Clet Martin est de ceux-là. Admirateur de Gilles Deleuze (l’homme qui inventa le concept de « pop’philosophie ») auquel il fut le premier à consacrer une étude complète peu avant la mort de celui-ci, il a toujours conservé intacts la curiosité et l’émerveillement suscités, chez lui, par la science-fiction, la bande dessinée et le cinéma. De Blueberry à l’Incal, dédié à l’oeuvre du Janus Giraud/Moebius, poursuit ainsi sur la lancée des livres que Martin a consacrés à Blade Runner ou à l’idée de plurivers, à la SF en général ou à Jorge Luis Borges. Il prend la forme d’un voyage aussi systématique que sensible, tirant les fils politiques, esthétiques et même cosmologiques traversant les albums de Blueberry et de L’Incal, tout en dessinant à grands traits le paysage de références à partir desquels ceux-ci se sont construits. Grande déclaration d’amour, De Blueberry à L’Incal est toutefois aussi un grand livre de philosophie -car telle est la première exigence de la pop’philosophie: que la pop culture défie les habitudes et les réflexes de la pensée elle-même. Pari gagné.

De Jean-Clet Martin, éditions Les Impressions Nouvelles, 336 pages.

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