Danse avec les boulons

Iconoclasts entretient la flamme de Metroid en jouant d’une clef à molette multiusages. Une orgie de pixels, entre exploration, tir et conscience politique.

Les ressources énergétiques du monde d’ Iconoclasts s’épuisent. Mais la pensée dominante de cette société vouée au Projet condamne sévèrement tout individu pris en flagrant délit de réparation. D’une poignée de porte à une machine agricole, le monde pixélisé que Joakim Sandberg a obstinément assemblé pendant sept ans dépend donc du bon vouloir des techniciens bénis de la Mère. Cette figure mystique dirige une société au bord du gouffre, pour un pitch refusant « unénième sauvetage du monde » selon son auteur suédois. De fait, le jeu entre plateforme, tir et réflexion ne se contente pas d’évoquer la grande arnaque de l’obsolescence programmée et de l’échange standard…

Armée d’une clef à molette, Robin, mécanicienne rebelle, met, malgré elle, le doigt dans l’engrenage d’une lutte contre le pouvoir établi. Du souvenir d’un père absent à un gradé qui change de camp, l’héroïne file dans une production rétro brandissant l’importance de l’engagement politique dans la vie civile. Tragique, drôle et surtout terriblement contemporain, Iconoclasts et les nombreux dialogues qui rythment ses phases de jeu ouvrent plusieurs débats, sans porter de jugement.

Cette conscience est d’autant plus surprenante que Joakim Sandberg déballe une orgie visuelle 2D aux détails naïfs et souriants. Megadrive es-tu là?Une brume de chaleur fait danser des cactus à l’arrière-plan d’un monde désertique. Les animations des protagonistes et la vingtaine de boss géants (souvent métalliques) invoquent également l’esthétique de Metal Slug. Mention spéciale, enfin, au Sonic des années 90 pour l’emploi immodéré de cubes dans les décors.

Mécano de pixels

L’éternel Metroid se dresse comme le mur porteur ludique d ‘Iconoclasts. On parle d’ailleurs de Metroidvania. Dissimulant avec talent des clefs ouvrant des portes de sortie, des tableaux se succèdent jusqu’à former des labyrinthes aux chemins multiples et aux détours facétieux. Sandberg, en bon disciple de Nintendo, perpétue l’idée de double fonction des armes chez Robin. Sa clef à molette joue ainsi au ping-pong face aux projectiles envoyés par certains adversaires. Mais l’objet fétiche sert également à tourner des boulons activant des dizaines de portiques et plateformes mobiles pour des phases de réflexion huilées comme une horlogerie suisse. Déclencher des interrupteurs inaccessibles ou éliminer un serpent à la gueule grande ouverte: cette dualité outil/arme s’applique également au lancer des bombes de Robin.

Des cités sous-marines aux mégapoles endormies sous la neige, le jeu tend des ressorts ludiques qui ne tournent jamais en rond, notamment grâce à un bestiaire furieusement original. Un cerf mauve presque invincible fonce dans le tas. Plus loin, des robots possédés par des aliens mécaniques lancent des éclairs. Trouver les failles -toutes différentes- de ces créatures ennemies se fait sourire aux lèvres. Un constat également valable face aux boss de fin de niveau. Une statue aztèque psychopathe? Un improbable hélico équipé de bras géants? Bienvenue au zoo!

Iconoclasts

Édité par Bifrost Entertainment et développé par Joakim Sandberg, âge: 12+, disponible sur PC (version chroniquée), PlayStation Vita et PlayStation 4.

8

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