Dans la mer vivante des rêves éveillés

Dans un hôpital de Hobart en Tasmanie, Francie, atteinte par le grand âge, s’en va doucement entourée par ses trois enfants survivants, tandis qu’au dehors d’immenses incendies ravagent l’éden naturel de cette île et, plus loin, de l’immensité australienne. À son chevet, Tommy, souffrant de bégaiement, est resté tasmanien afin de s’occuper de sa mère. Présent également, Terzo a pour lui la réussite éclatante et la rage de vivre qui semblent masquer un point aveugle. Enfin, Anna, personnage central du roman, s’est aussi exilée en Australie, dans la solitude de la réussite qui ne partage rien, rongée par la culpabilité, égoïste, méprisant, comme son frère de réussite, celui qui a choisi de rester, le  » pauvre » Tommy… Elle a entretenu avec sa génitrice une relation fertile. Ses deux frères s’acharnent, contre la volonté de celle-ci, à la maintenir en vie, tandis qu’au dehors, mise à mort, la nature n’en finit pas d’agoniser. Dans un style fluide, sinueux parfois, changeant aussi, Richard Flanagan signe un roman vertigineux (métaphore de l’anthropocène, de l’aveuglement digital de notre société lissée face à la beauté du monde), à la fois familial, philosophique et parfois fantastique. Il y sonde la complexité des rapports « fraternels », des secrets de familles, avec humanité, et ce que celle-ci a de formidable et détestable à la fois.

De Richard Flanagan, éditions Actes Sud, traduit de l’anglais (Australie) par France Camus-Pichon, 288 pages.

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