Genre ultra codé à l’origine, le teen movie n’en finit pas de se réinventer. La caméra aime les ados, en effet, qu’elle modèle à sa façon…

Rien de mieux balisé, à priori, qu’un teen movie: le passage de l’adolescence à l’âge adulte a ses étapes pratiquement obligées, codes que le cinéma ne s’est fait faute d’exploiter, parfois fort joliment d’ailleurs, de Fureur de vivre en American Graffiti. Signe, toutefois, d’un rapport désormais autre à l' »âge ingrat », Les beaux gosses de Riad Sattouf étonne tout d’abord par son regard, en restaurant une figure pour ainsi dire oubliée, celle de l’ado boutonneux, traditionnellement voué à la marginalité d’un écran qu’il occupe ici sans partage – façon crise d’acné mangeant le visage.

Filmé au naturel, à hauteur d’ado – Riad Sattouf cite Les 400 coups de François Truffaut et La vie ne me fait pas peur de Noémie Lvovsky parmi ses influences -, le film met aussi en scène des protagonistes ancrés dans le réel en même temps que d’une confondante banalité, affirmant ce faisant sa singularité. Si, d’une façon générale, la caméra aime en effet les ados sans réserve – postulat encore vérifié tout récemment de Lol en Linha de passe -, c’est aussi pour mieux les modeler à sa manière. Ou assortir leur présence à l’écran de questionnements parallèles, non dénués d’intérêt au demeurant.

Breakfast Club

Devrait-on cependant s’en tenir à la stricte loi du nombre, que le teenager de cinéma apparaîtrait comme le héros privilégié de farces potaches d’un goût souvent approximatif – genre dont l’industrie américaine s’est fait une spécialité, force profits à la clé d’ailleurs, de American Pie en College Road Trip et autres déclinaisons débitées au kilomètre de pellicule. Il n’en faudrait guère plus pour convaincre le commun des mortels que, tout bien considéré, ces ados émargent à une autre planète…, sentiment que vient fort heureusement corriger un autre versant de la production américaine.

Si Larry Clark et Gus Van Sant en sont les plus emblématiques, les auteurs sont en effet nombreux à avoir tenté récemment de cerner l’adolescent dans son rapport au monde. Qu’il s’agisse du spleen adolescent, magnifiquement cadré par Sofia Coppola dans Virgin Suicides ou Terry Zwigoff dans Ghost World – deux films au féminin! -, ou de l’angoisse face à un monde n’ayant guère de réponses ou de repères à offrir – le thème qui irrigue tant Elephant de Van Sant que le tout récent Afterschool d’Antonio Campos -, la perspective s’enrichit, tout en préservant de l’ado l’image floue de l’être en (dé)construction. Fort logiquement, d’ailleurs, l’éducation reste l’un des enjeux majeurs du film d’ados au sens large, et toutes latitudes confondues – Entre les murs en est la limpide illustration.

En version light, les murs de l’école abriteront encore High School Musical, histoire sans doute d’activer la machine à rêves pour Teenage Fanclub. Question glamour, ce sont toutefois surtout les protagonistes de Twilight qui se posent un peu là, version fantasmée d’une adolescence clichée dans son pouvoir de séduction et dans la grandeur insondable de son mystère. C’est dire aussi si, à tous égards, les gamins des Beaux gosses apparaissent résolument inoffensifs.

Texte Jean-François Pluijgers

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