Dit vulgairement, le « circuit bending » qualifie la transformation artistique de jeux électroniques pour enfants en instrument de musique. Scientifiquement, il désigne l’activité qui consiste à court-circuiter volontairement des instruments de musique électroniques de faible voltage fonctionnant sur piles (jouets pour enfants munis de haut-parleur, effets pour guitare, petits synthétiseurs) de façon à créer de nouveaux générateurs de sons. Si des méthodes similaires ont été utilisées auparavant par d’autres musiciens et ingénieurs, Reed Ghazala est généralement considéré comme l’inventeur du « circuit bending ».

Tout commence en 1966 quand, par le plus grand des hasards, un jouet se court-circuite contre un objet métallique de son bureau. Alors qu’il travaille sur les connexions entre les arts visuels et la musique, Ghazala, ado fauché, referme sa table de dessin sur un jeu électronique désossé. Le choc émet un bruit hors du commun. C’est le début d’une longue, improbable et extraordinaire aventure. Ghazala inventera le terme de « circuit bending » et propagera la bonne parole à travers ses écrits. Puis son site Internet. Devenant le gourou des électro pervers.

Si les instruments détournés de Ghazala ont atterri dans les collections permanentes des plus prestigieux musées, plusieurs musiciens les ont utilisés en studios d’enregistrement et lors de leurs concerts. Ces méthodes ont fait le bonheur des bidouilleurs comme Aphex Twin, Kraftwerk, Orchestral Man£uvres in the dark…

Do-it-yourself

Les « circuit benders » composent de la musique avec des jouets qui n’ont manifestement pas été conçus pour en faire. Ils détournent de leurs fins des objets commercialisés et donc protégés par la loi. Une attitude subversive, anticapitaliste que certains d’entre eux revendiquent. Les benders récupèrent, réinventent, recyclent. La dictée et le calcul magiques ainsi que le Furby Original (poupée parlante) sont, en raison de leurs bas prix et des possibilités qu’ils offrent, parmi les jouets et instruments les plus fréquemment utilisés. Du moins aux Etats-Unis.

Récent lauréat de Puredemo, adepte du fer à souder, le Liégeois Xavier Gazon, alias Playboy’s Bend, leur préfère les guitares électroniques, les vieux Casio ou encore les Abécédaires, ces petits jeux éducatifs qui apprennent aux enfants à parler. Il les débusque dans les brocantes, à la Croix-Rouge, à l’armée du salut.  » Je rentre dans la machine. J’interviens dans le hardware, détaille-t-il. Mais je me considère avant tout comme un musicien. J’utilise le circuit bending pour créer. Cette technique débouche rapidement sur quelque chose d’expérimental. Or, je m’oriente davantage vers l’électro-pop. »

Xavier Gazon qui, par le passé, faisait de la musique avec des synthés et du software, s’est intéressé aux jouets après avoir repris des cours du soir en électronique.  » J’aime le do-it-yourself et l’idée de démystifier l’électro. Avant, j’étais plongé dans l’expérimental, l’alternatif. Une musique de mecs très technique. Maintenant, je touche tout le monde. Les filles, les enfants… Monter sur scène avec des jouets fait sauter une soupape. Aide à écouter une musique comme la mienne, non standardisée. » Le premier EP de Playboy’s Bend, qui s’apprête à jouer en Suisse et en Espa-gne, est prévu pour début 2009. Vous voilà au courant.

http://www.playboysbend.com/

www.myspace.com/playboysbend

J.B.

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