Les Trans Musicales jouent les défricheurs depuis près de 30 ans. Leur programmateur, Jean-Louis Brossard, lève un coin du voile.

Focus: comment peut-on résumer un festival comme les Trans?

Jean-Louis Brossard: l’idée est de montrer des artistes à un public qui ne les connaît pas. Le festival est né de cette dynamique. Nous avons commencé, lors de notre première édition en 1979, par faire découvrir des groupes de Rennes aux Rennais. Puis, nous nous sommes progressivement agrandis. D’abord, en portant notre attention sur toute la Bretagne. Ensuite, en nous intéressant à des groupes comme Cabaret Voltaire ou TC Matic. C’est lors de la visite de ces derniers que j’ai vu mon premier flightcase.

Comment un tel événement gagne-t-il ses lettres de noblesse, sa crédibilité, et se met-il à parler aux gens du métier?

Nous avons d’emblée bénéficié d’un super papier dans Libération. Les gens se sont aperçu qu’il se passait des choses en France hors de Paris. Nous avons commencé à recevoir de plus en plus de démos. Aux Trans Musicales, les artistes parlent aux artistes. C’est ainsi que nous avons accueilli Noir Désir avant même la sortie de son premier album. Que se montent des rencontres entre Buck 65 et Tunng. Et plus récemment encore, entre Orka et Yann Tiersen. Je pense que les Trans révèlent, déclenchent… Nous avons par ailleurs salué la première date française – voire européenne – de nombreux musiciens. La sensibilité des Français est différente de celle des Anglais.

Comment dénichez-vous ces artistes avant tout le monde?

J’écoute énormément de démos. J’achète beaucoup de disques. Et je me déplace dans d’autres festivals de jeunes talents comme by: Larm en Norvège, le Spot au Danemark… Je découvre la plupart de ces groupes dans les clubs, les bars. J’en fais aussi bosser certains pour qu’ils soient prêts au moment venu. Je les emmène devant des publics et dans des environnements fort différents. Un concert en salle, ça vaut trois répétitions.

Pour vous, comme pour l’industrie du disque, Internet doit tout de même changer la donne…

Evidemment, mais tout le monde ne possède pas la même sensibilité. Tout le monde ne parie pas sur les mêmes groupes. A mes yeux, le Web permet surtout d’accélérer les choses. Quand on me propose un groupe par téléphone, je peux déjà commencer à l’écouter alors que mon interlocuteur est encore à l’autre bout du fil. J’utilise énormément MySpace et certains artistes m’ont excité dès que je les ai vus sur YouTube…

Qu’est-ce qui, en fin de compte, guide votre programmation?

Ma subjectivité. La seule limite que je me fixe, ce sont mes goûts personnels. Je suis preneur de choses aventureuses, voire bizarres. Un mendiant aveugle du Mali qui tape sur des boîtes de conserve, ça me plaît. Je ne peux pas défendre ni inviter ce que je n’aime pas. Il m’est arrivé par exemple d’annuler un groupe, que j’avais confirmé, après l’avoir vu sur scène.

Entretien Julien Broquet

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