Souvenirs d’un pas grand-chose, de Charles Bukowksi (éditions Le livre de poche)

Littéralement « Jambon sur pain de seigle » (Ham on Rye), le récit d’apprentissage, paru en 1982 et écrit à la première personne, de l’alter ego littéraire de Bukowski, Henry Chinaski, durant les années de Grande Dépression à Los Angeles. Soit les bastons portées par son père, la découverte du whisky -boire pour ne pas se sentir perdu et inutile-, la recherche désespérée d’un boulot et les premières prétentions littéraires. Misanthrope et désespéré, Chinaski pressent très tôt son incapacité totale à être heureux. « Sans compter qu’il n’y avait rien mais alors ce qui s’appelle rien d’intéressant dans l’existence. » Clairvoyant, cynique, sans concessions.

La conjuration des imbéciles, de John Kennedy Toole (éditions 10/18)

Né en 1937, Joseph Kennedy Toole ne trouve pas d’éditeur de son vivant. Persuadé d’être un écrivain raté, il se suicide à l’âge de 32 ans. Sa mère, opiniâtre, parvient à faire éditer après sa disparition La conjuration des imbéciles, sommet tragi-comique baignant dans les bas-fonds de la Nouvelle-Orléans. Soit l’histoire d’Ignatius, sorte de néo-Don Quichotte obèse et fainéant vivant aux crochets d’une mère arthritique, étudiant en littérature médiévale génial et égocentrique, parano, hypocondriaque et réac, en plein décalage avec une époque et une Amérique de dégénérés qu’il abhorre et dédaigne copieusement. Prix Pulitzer à titre posthume en 1981.

Mon chien stupide, de John Fante (éditions 10/18)

Entre la lost generation d’Hemingway et la beat de Kerouac, on trouve John Fante, en qui Bukowksi voyait un maître absolu. Dans ce sommet satirique paru après sa mort en 1985, un chien étrange s’invite dans le quotidien décousu d’une famille californienne vivotant dans la banlieue de Santa Monica. Et mène un écrivain-scénariste raté et quinquagénaire en sérieuse galère existentielle et financière à faire l’amer bilan de sa vie. Soit le portrait, ironique et tragique en diable, d’un antihéros en pleine midlife crisis qui a tout de l’avatar de John Fante lui-même, narcissique, coureur de jupons, alcoolique, colérique et mégalo. Le retour de bâton du rêve californien en plein.

Karoo, de Steve Tesich (éditions Monsieur Toussaint Louverture)

Livre d’une vie pour Tesich qui mourra quelques mois après en avoir posé le dernier mot en 1996, Karoo conte l’ultra moderne solitude d’un « script doctor », écrivain raté qui révise sans passion des scénarios pour Hollywood. Arrivé au palier d’une cinquantaine ventripotente, Karoo baigne dans une médiocrité vaseuse, tassé sur lui-même et son alcoolisme caractérisé, enfermé dans des névroses intimes et familiales qu’il s’inocule presque par ennui. Lucide dans ses lâchetés, l’homme se contente de balader la panoplie des rôles que les autres désirent lui faire prendre. Un chef d’oeuvre de désenchantement typiquement US désopilant et incroyablement cynique.

Y.P.

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