Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

DUO FORMÉ PAR LE CHANTEUR ANDERSON. PAAK ET LE PRODUCTEUR KNXWLEDGE, NXWORRIES FILE UN PREMIER ALBUM DE SOUL HIP HOP QUI FAIT DU BIEN PAR OÙ IL PASSE.

NxWorries

« Yes Lawd! »

DISTRIBUÉ PAR STONES THROW/V2.

7

C’est l’un des disques de 2016 vers lequel on revient le plus souvent. Et ce n’est sans doute pas un hasard. Au vu de l’actualité morose, pour ne pas dire franchement désespérante, de ces derniers mois, le Malibu d’Anderson. Paak, sorti en janvier dernier, a pour lui un côté solaire. Une vibration soul lumineuse, qui fonctionne volontiers comme un baume face à la grisaille ambiante. Depuis, l’Américain a continué d’enchaîner les bons plans: on l’a aperçu sur des morceaux du producteur Kaytranada (Glowed Up) ou des rappeurs Schoolboy Q (Blank Face) et Mac Miller (Dang!). Avec à chaque fois, ce même grain, ce même groove, d’une coolitude irrésistible.

Avant la révélation Malibu, c’est toutefois sur le dernier album en date du légendaire Dr. Dre qu’Anderson. Paak avait été repéré (présent sur six des seize titres que comptait Compton, sorti l’an dernier). A l’époque, c’est notamment sur base du mini-tube Suede que Dre avait demandé au jeune chanteur de le rejoindre en studio. Le morceau en question était signé NxWorries. Soit l’alliance entre Anderson. Paak et son pote, le producteur Knxwledge (Glen Earl Boothe dans le civil). C’est ce duo qui lâche aujourd’hui un premier album, intitulé Yes Lawd!, avec un point d’exclamation qui dit déjà tout.

Les exemples de binômes entre un producteur et un rappeur/chanteur sont légions dans le rap. Quand ils fonctionnent, ils réussissent souvent à atteindre des sommets. C’est le cas de NxWorries, où la symbiose est bluffante. Tout ici semble couler de source, tout paraît simple. Parfois trop même, glisseront certains. C’est vrai que Yes Lawd! déroule avec une facilité déroutante. Au point de donner parfois l’impression d’une certaine uniformité. C’est sans doute aussi le prix à payer pour un album alignant 19 morceaux, interludes compris, la plupart ne dépassant pas les trois minutes.

Mais s’il est cohérent (parfois trop?), NxWorries snobe surtout tout effet de manche. Truffé de samples soulful (What More Can I Say et ses cordes à la RZA), n’hésitant pas à glisser même jusqu’au disco seventies (Scared Money), l’album évoque encore le néo-classicisme d’un J Dilla (Can’t Stop). Ou, comme on a pu le lire sur un forum, une version soul/RnB du Madvillainy de Doom et Madlib -pour la manière d’enchaîner les miniatures, quitte à donner l’impression, frustrante, de laisser certains morceaux en jachère (Jodi).

Emmené par la voix, aussi charismatique que bienveillante, d’Anderson. Paak, porté par les productions redoutablement efficaces de Knxwledge, Yes Lawd! a le sourire contagieux. I got love for you!, indique le duo en intro. Il ne s’agit pas forcément d’un disque de funk cocoon, encore moins de soul bisounours –« Cops want to see a nigga dead », glisse. Paak, sinistre, sur Khadijah. NxWorries voit la même réalité, et assiste au même spectacle délirant que tout le monde. En lui glissant une petite touche d’espoir, il le rend juste un peu plus supportable.

LAURENT HOEBRECHTS

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