Les jeux télévisés japonais s’invitent sur nos écrans. Particularités: mauvais goût, esprit gonzo et châtiments pour tout le monde.

On pensait avoir touché le fond de l’écran avec la téléréalité. Il existe pourtant pire que la Rai et Loft Story réunis. Une télé tout droit sortie de la 4e dimension, sorte de remake disco d’ Alice au pays des merveilles. Cette friandise cathodique nous vient du Japon, pays qui fabrique de la télé barrée comme d’autres des querelles communautaires. Souvenez-vous, cette séquence culte de Lost in Translation où Bob – Bill Murray – Harris se retrouve catapulté sur le plateau d’un animateur fou furieux d’une chaîne locale…

Là-bas, les jeux télévisés ressemblent à Intervilles sous acide. Costumes kitschissimes, châtiments sadiques et épreuves loufoques font partie du paysage. A côté, Le maillon faible a le tranchant d’un couteau en plastique. A croire que les scénaristes nippons prennent les mêmes remontants que Hunter S. Thompson, l’auteur du déjanté Las Vegas Parano. Car à bien y regarder, ces émissions qui font se gondoler le Japon tout entier dégagent un fort parfum gonzo. Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que l’un des artisans en chef de cette farce télévisée n’est autre que le réalisateur bien givré Takeshi Kitano ( Hana-bi, Kikujiro…).

De 86 à 89, il a animé Takeshi’s Castle, l’un des jeux les plus populaires de l’île. Au menu: cent candidats sanglés dans des tenues improbables devant braver une dizaine d’épreuves, et autant de situations humiliantes, pour espérer pouvoir affronter Kitano lui-même dans le final. Absurdité et souffrance (souvent soft mais pas toujours), deux ingrédients mis à toutes les sauces. Comme dans Gaki no Tsukai ya Arahende!!, variation de « Je te tiens, tu me tiens par la barbichette…. Sauf qu’ici, l’interdiction de rire prend des allures épiques (tenir une journée par exemple). Et que la sanction est nettement plus vacharde: coup de matraque dans les bijoux de famille…

Passe-muraille

Pourquoi en parler aujourd’hui? Parce que les extraits de ces émissions tournent en boucle sur YouTube. Et aussi parce qu’après les mangas, ces formats commencent à essaimer sur nos écrans. Pas en version originale malheureusement, mais dans des adaptations plus indigestes. L’hystérie japonaise ajoutant une touche d’exotisme et de distanciation qui rend l’expérience plus fascinante que consternante. En français, ne reste que la mécanique toute nue, le vernis sadique, ferments d’un spectacle forcément moins ubuesque. C’est ce qu’on ressent en découvrant Le mur infernal, copier-coller d’un autre jeu culte, que l’on peut voir depuis la rentrée sur AB3. Le principe de ce Tetris humain: un, deux ou trois candidats, casqués et emballés dans des combinaisons argentées qui les font ressembler à des bactéries dans une pub pour du dentifrice, se retrouvent face à un mur leur fonçant dessus et dans lequel a été découpé une ouverture. A eux de trouver la position acrobatique qui leur permettra de passer à travers. Sinon, c’est le plongeon dans la piscine, déclenchant l’hilarité générale et les commentaires acides de Laurence Boccolini.

Bienvenue dans la télé potache.

LA CHRONIQUE DE laurent raphaël

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content