De Naast aux Plastiscines, les jeunes rockers parisiens ont la cote. On se penche sur leur landau avant le concert bruxellois des BB Brunes.

Philippe Man£uvre, rédacteur en chef du Rock & Folk et accessoirement membre du jury de la Nouvelle Star, compare l’émergence de la jeune scène rock parisienne à celle du punk en Angleterre et aux Etats-Unis. Aussi mégalo que risible. Toujours est-il qu’elle fait la une des magazines (et pas que du sien), enchaîne les plateaux télé et remplit les playlists des radios. Sans parler des salles de concerts. Le gig des BB Brunes à Belgique affiche complet depuis belle lurette et les Plastiscines commencent même à décrocher des dates en Angleterre et aux Etats-Unis.

Phénomène? Tempête dans un verre de bière? Si elles attirent, à Paris et ailleurs, des centaines de petits mecs en slim, Louise, Marine, Katty et Anaïs le doivent davantage à leur physique qu’à leur musique. La plastique, c’est fantastique. Les Plastiscines n’ont rien des Slits et des Stooges dont elles ont eu l’honneur d’assurer des premières parties.

LA WEB RADIO

Les baby rockers parisiens (moyenne d’âge 18 ans) sont les filles et fils d’un immense battage médiatique. Les temps changent. Ni Téléphone ni Trust ni même Noir Désir, illustres et bien plus glorieux aînés, n’avaient eu droit à la couverture du Rock & Folk lors de la sortie de leur premier album. Il y a tout juste un an, Naast et les Plastiscines « faisaient » successivement la une en papier glacé du mensuel. Cela aide à vendre des disques. Même à l’époque du téléchargement sauvage.

Influencés par les Libertines, les Strokes et autres White Stripes, les enfants du rock ne crachent pas dans la soupe. Ils doivent beaucoup à Internet.  » On se réfère à des groupes comme Blondie ou The B-52’s parce qu’on les a découverts via le Web, avoue le girls band. Les parents de l’une d’entre nous possédaient ce genre de disques à la maison mais c’est Internet qui a fait notre éducation. Une découverte en amenant une autre.  » Les Naast confirment:  » Le Web est notre radio. Avant, on écoutait du rap. Avec le Net, on a tout chopé: Stooges, MC5, New York Dolls… On avait le monde à portée de main. Notre quête du Graal. »

Pas une faute de goût dans les références affirmées. Mais pas non plus la trace d’un seul artiste franco- phone. Excepté un Gainsbourg dont ils se trouvent pourtant à des milliers d’années lumière. C’est l’une des grandes caractéristiques du mouvement. Les gamins sont décomplexés face à leur langue maternelle. Ils chantent en français. Parlent directement aux ados.

GOSSES DE RICHES

Premier problème. Les paroles débiles sonnent nettement mieux dans la langue des Ramones que dans celle de Johnny Hallyday.  » Oh BB s’il te plaît. Baise-moi cette nuit. Mes ovaires sont prêts. Mes ovaires t’en supplient » (de BB Brunes) ne pourra jamais rivaliser avec  » She was a fast machine. She kept her motor clean. She was the best damn woman that I ever seen« (court extrait du You Shook me all night long cher à AC/DC).

Deuxième accroc. La plupart de ces rockers à peine majeurs viennent de milieux privilégiés. Les Plastiscines répétaient dans une cave de Saint-Cyr-l’Ecole en buvant… du vin blanc (pas de la cara pils). Gustave, chanteur des Naast, est le fils du journaliste Paul Rambali (chroniqueur pour le… Rock & Folk). Et Sacha, le chanteur des Second Sex, a entamé des études de commerce. On a connu plus populaire.  » On nous a assez accusés d’être des gosses de riches. On a simplement la chance d’avoir des parents qui peuvent nous aider« , tente de relativiser Arthur, guitariste des Second Sex. Pas faux. Puis Joe Strummer était fils de diplomate. Et les Strokes sortent d’écoles privées.

LES ANTI

Alors, on en revient à l’essentiel: la musique. Dépourvus d’originalité, d’engagement, les gamins parisiens n’arrivent pas à la cheville de Téléphone, Bérurier Noir et Noir Désir. Dès lors, si les BB Brunes ont vendu 75 000 albums en France (disque d’or) et écoulé quelque 3 000 plaques en Belgique, ils sont bien loin de faire l’unanimité. Comme les Nazes et les Pas Très Fines, tels que les ont rebaptisés leurs détracteurs.

Les Anti Plastiscines et les Fnactiscines, comités de sauvegarde de nos chastes oreilles, ont créé leur My- Space, des t-shirts et un petit mode d’emploi pour boycotter les concerts des Parigotes. Un slogan?  » Les Plastiscines sont au rock ce que José Bové est à la révolution.  » Dans les FNAC, les empêcheurs de tourner en rond vont même jusqu’à coller des autocollants  » J’écoute de la merde » sur leurs CD.  » Nous critiquons le fait qu’aujourd’hui le mot rock ne sert plus à classer une musique dans un genre, précisent-ils. Mais à faire vendre un disque dont le succès repose (quasi) exclusivement sur l’apparence des musicien(ne)s et sur la qualité du marketing.  » Tout est dit.

Plastiscines: LP1 www.myspace.com/plastiscine BB Brunes: Blonde comme moi www.myspace.com/bbbrunes Naast: Antichambre www.myspace.com/lesnaast Second Sex: album à venir www.myspace.com/secondsex

TEXTE JULIEN BROQUET

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