TOUTE PREMIÈRE FOIS – À L’HEURE OÙ LA FEUE RENTRÉE LITTÉRAIRE TIRE LE RIDEAU, RENCONTRE AVEC MARIA POUCHET, DÉBUTANTE QUI S’Y EST AVANCÉE. PREMIER ROMAN, MODE D’EMPLOI.

DE MARIA POURCHET, ÉDITIONS GALLIMARD, 240 PAGES.

« La semaine dernière, un journaliste a fait mon interview puis s’est fait coincer par sa rédaction, qui trouvait que mon livre était déjà trop vieux pour en parler. Vous imaginez? Heureusement que j’ai entamé mon deuxième roman… » La vie littéraire est cruelle, zappeuse, où tout se joue en quelques mois ou moins. Propulsé en septembre dernier aux côtés des derniers Philippe Djian, Joy Sorman ou Florian Zeller, le livre de Maria Pourchet, 32 ans, était l’un des premiers romans dont Gallimard avait pavé sa rentrée -l’une des plus commentées. Déjà quasi de l’histoire ancienne, pourtant, à l’aube d’entamer le mois de janvier, deuxième grand rendez-vous de l’année littéraire…

Soit l’histoire de Victoria, jeune femme « en quête d’avenir » fraîchement sortie des études, qui regarde la vie de son balcon avant de se voir forcée d’en descendre, de Marc-Ange, professeur ayant succombé à son charme, du Petit, jeune surdoué de dix ans qui vient envahir leur monde un week-end sur deux, de sa soeur jumelle un peu limite, et de quelques autres. « Au moment d’écrire, très vite, les personnages ont pris leur liberté. J’avais la sensation d’assister à leurs déboires, leurs incidents, de travailler sous leurs dictées. Je crois que c’est une expérience propre au premier roman. Un moment d’épiphanie qui ne se reproduit plus par la suite. » L’écriture, Maria Pourchet, Vosgienne montée à Paris au début des années 2000 -« arrivée sur un mode Rastignac, selon la figure obligée »-, la fantasme depuis ses huit ans. Un projet savamment reporté depuis, jusqu’au jour où la chose a commencé à sonner comme une urgence. « Je ne pouvais plus avancer si je n’entamais pas enfin cette vie que j’avais tant attendue, une de ces vies où on commence à écrire et où ça ne s’arrête plus… Même si j’ai déjà pu vérifier que c’était un fantasme: il y a beaucoup d’incidents dans l’activité d’écriture, et des tas de motifs d’arrêter. » Raison de plus pour donner à son premier roman, livre-fable ironique sur le développement personnel et l’épanouissement, un titre programmatique -« Avancer, c’est le tout premier mot que j’ai écrit. » Celle qui a longtemps couru les missions de sociologue freelance y parle de ce qu’elle connaît, peuplant son roman d’intellectuels précaires, de doctorants de type long et d’une famille bobo recomposée: un univers vif, rythmé, aux 100 idées minute, balancé d’un second degré et d’une dérision omniprésents. « C’est le seul registre que je connaisse. Je n’ai jamais été capable de cultiver une autre manière de constater, de supporter le quotidien. »

Coeur simple

Son premier manuscrit, Maria Pourchet décide de l’envoyer d’abord à deux, trois maisons d’édition modestes. Certaines lui répondent: caution suffisante pour tenter alors le saint des saints -la boîte aux lettres Gallimard. Le choc d’y avoir été acceptée n’est pas encore dissipé. « Ça va faire coeur simple dit comme ça, mais il y a quelque chose de l’ordre de l’émerveillement. Je me suis rendue compte que les auteurs qui m’ont accompagnée depuis toujours, qui m’ont sauvé la vie, étaient tous des auteurs Gallimard: Jean Giono, Romain Gary en tête. » Un catalogue dont la jeune femme espère continuer à ajouter des entrées, embarquée, déjà, dans une autre histoire. « Le deuxième roman, c’est différent. On sait qu’on est capable de finir, c’est déjà beaucoup. Des histoires, on en a toujours, des personnages, on en croise tout le temps. La seule question qui me taraude, c’est est-ce que la langue va se laisser faire? C’est un truc très enfantin de l’ordre du « est-ce qu’on va pouvoir continuer à jouer ensemble? » »

PROPOS RECUEILLIS PAR YSALINE PARISIS

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content