Le cinéaste italien adapte avec doigté Caos Calmo de Sandro Veronesi, l’histoire d’un homme qu’un deuil amène à faire l’inventaire de sa vie.
A peine le retrouve-t-on dans un hôtel bordant un canal d’Am-sterdam que l’expression Caos Calmo, qui donne son titre à son film ( voir notre critique en page 31), fait un peu plus sens. Antonello Grimaldi, c’est en effet un mélange d’exubérance enjouée et de précision posée au moment de décrypter plus avant une £uvre dont l’intitulé renvoie au calme qu’oppose un homme à son chaos intérieur, consécutif à la mort de sa femme. A l’origine du film, un best-seller de Sandro Veronesi, qui souhaitait, initialement, donner à son sujet un traitement… cinématographique. » Il est allé trouver le producteur Domenico Procacci et Nanni Moretti pour leur demander conseil, avant même de commencer à écrire. Et ils lui ont suggéré de plutôt faire un roman de cette histoire. »
Le manuscrit n’est cependant pas encore publié que… Procacci en acquiert les droits d’adaptation. Moretti, quant à lui, manifeste de l’intérêt pour le rôle principal, auquel il souhaite se consacrer exclusivement, déclinant l’invitation à également mettre en scène. C’est là qu’intervient Grimaldi, vingt ans de réalisation au cinéma et à la télévision, répondant à l’appel de son ami Procacci: » Nous nous connaissons depuis l’école de cinéma, dans les années 80. Nanni aussi est une vieille connaissance, j’avais d’ailleurs un petit rôle dans Le Caïman. » Et de se retrouver aux commandes du projet – » j’espère aussi en raison de ma façon de filmer… » (rires).
L’indispensable travail d’adaptation accompli, le film prend forme: » Ce qui m’importait, c’était de montrer un homme qui fait le choix d’arrêter dans une société en mouvement continu; de voir ce manager à succès s’asseoir sur un banc, et tenter de soigner une douleur existante en se préoccupant d’une douleur susceptible de survenir. Non sans prendre conscience, au passage, de l’existence d’un monde qu’il ignorait totalement, élargissant ainsi son horizon. »
Palindrome
Ou comment renaître à la vie, en un mouvement que le film rapproche de la figure du palindrome. » Je l’ai empruntée au roman, rapporte Antonello Grimaldi. Tout le dénouement est annoncé par la scène de classe où l’on parle du palindrome, et du caractère, réversible ou non, des choses. »
Renaissance qui passera encore par une scène d’amour physique, dont la tonalité, brutale et cruelle, tranche avec le reste du film. » Il ne pouvait en être autrement. C’est une scène indispensable, elle devait être dure et directe. On l’a tournée en une demi-journée, 4 heures à peine, 4 bières pour Nanni et 3 vodkas pour Isabella Ferrari, ça aide. » Qu’il y ait eu en outre là un parfum de scandale transalpin, le réalisateur l’attribue à la stature de Moretti – « N’importe quel autre acteur aurait pu le faire sans qu’on y trouve rien à redire. Est-il une telle icône? »
Plus fondamentalement, Grimaldi n’aura eu qu’à se féliciter de sa collaboration avec un auteur réputé pourtant peu malléable. » Travailler avec Nanni s’est révélé très facile. Ce fut un plaisir pour lui de n’éprouver ni la peur ni l’anxiété du réalisateur ou du producteur. Je lui ai bien précisé que je serais le patron et il se l’est tenu pour dit. Nous sommes toujours amis. Pas des amis de chaque jour, mais tous les jours, ce serait lourd… » (rires).
Jean-François Pluijgers, à Amsterdam
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