Bonus Mali. Amadou & Mariam, nouvelles stars pop? La preuve avec leur cinquième album, pont lumineux entre l’Afrique et l’Occident.

« Welcome to Mali »

Distribué par warner.

Comment va la world music? ça tangue, mon capitaine, ça tangue – on en parlait encore récemment ( Focus du 10 octobre). Mais si le genre – qui n’en est toujours pas un d’ailleurs, mais bien un tiroir pratique pour caser toute musique non occidentale -, si le genre donc est en crise, c’est plutôt une crise de… croissance. La world est nulle part, parce qu’en 2008 elle est partout: des bidouillages électroniques de Diplo aux penchants africains des rockeurs new-yorkais de Vampire Weekend.

Il faut donc saluer comme il se doit le nouvel album d’Amadou et Mariam. La world manque de stars? On avait oublié le couple malien, formé en 1977, après une rencontre à l’Institut des jeunes aveugles de Bamako. Avec eux, l’Afrique reprend la main. Et par un juste retour des choses, donne ici sa version du rhythm’n’blues, du rock, de la soul (Amadou Bagayoko répète à qui veut l’entendre sa passion pour Led Zep ou Stevie Wonder).

Welcome to Mali est déjà leur cinquième album. Le précédent, Dimanche à Bamako, produit par Manu Chao, avait enfin fait le break. La France surtout avait suivi, où ont été écoulés quelque 300 000 des 500 000 exemplaires vendus. Cette fois-ci, c’est le monde qui est visé. Anglo-saxon d’abord, puisque depuis le duo s’est retrouvé à jouer jusque sur le podium du festival de Glastonbury, ou en première partie des Américains néo-disco de Scissor Sisters.

Damon Albarn (Blur, Gorillaz) est donc notamment invité ici à poser sa patte. C’est lui qui est aux manettes du premier morceau, Sabali. On y entend le couple, téméraire, lâcher complètement prise. Tandis que la guitare d’Amadou s’efface devant un clavier à l’Electric Light Orchestra, la voix de Mariam se pince au point de ressembler à des incantations bollywoodiennes. Le genre de titre rare, qui à lui seul ouvre un tas de nouvelles perspectives. Ou en tout cas, redonne une nouvelle vision du jeu sur un terrain pourtant connu. Dès le morceau suivant cependant, le couple – et Marc-Antoine Moreau, manager et réalisateur de l’album avec Laurent Jaïs – reprennent les commandes. Albarn est toujours là au clavier, mais les sons redeviennent plus familiers, les atmos-phères plus coutumières. La fusion Afrique-Occident proposée par Amadou & Mariam n’en reste pas moins pétaradante. A l’image de Masiteladi, train lancé à vive allure, sur lequel viennent se croiser cette fois-ci les guitares d’Amadou et Mathieu Chedid.

Table d’hôtes

M s’ajoute à une liste d’invités qui comprend également Keziah Jones, le rappeur somalien K’naan ou encore le camarade Tiken Jah Fakoly. Amadou & Mariam font table d’hôtes, mais ce sont bien eux qui sont en cuisine. Sekebe est ainsi un autre moment euphorique, emballé par des cuivres afro rutilants et le jeu bluesy d’Amadou. Symbolique, il termine le disque – officiellement du moins, un morceau fantôme étant caché quelques minutes plus loin -, et résume parfaitement la démarche du couple, capable de s’ouvrir sans se perdre. Un exercice jamais évident, réussi ici brillamment. En 2009, l’Amérique sera dirigée par un président fils d’émigré kenyan. Pendant ce temps, la world aura elle aussi son couple présidentiel venu d’Afrique: Amadou & Mariam.

En concert le 18/2, à l’Ancienne Belgique, Bruxelles

www.amadou-mariam.com

L.H.

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