Philippe Cornet
Philippe Cornet Journaliste musique

RETRO POWER FUNK – En deux albums, ces ketjes bruxellois associés à une pimbêche anglaise ont dynamité la pop funk eighties. Retour sur quinze minutes de gloire aujourd’hui rééditées.

« Best Of »

Distribué par N.E.W.S.

Un disque du début des années 80 qui a bien vieilli, ce n’est pas fréquent. Mais alors un disque belge de la même période qu’on peut se repasser sans vouloir changer de nationalité, cela n’existe pas. Hormis peut-être une vieillerie plombée de TC Matic, et dans le cas qui nous occupe, les deux vinyles d’Allez Allez: le mini-album African Queen et le full LP Promises sortis en 1981-1982. Une carrière comme un claquement de fusil- très courte -, mais dont la détonation revient nous plomber les fesses un bon quart de siècle plus tard… Et pour cause, ce mélange coloré d’afro-pop, de rythmiques à la Chic, de funk à la Defunkt, engendre toujours son quota de testostérone pour les garçons et de chaloupement pour les filles. Une musique à danser héritière de Marine, autre groupe belge qui eût ses trente secondes de gloire à un moment où la new wave européenne s’amourache volontiers de black music.  » J’étais encore en rhéto à l’athénée Léon Lepage. Le préfet m’encourageait à passer mes examens mais j’étais dans Allez Allez qui connaissait une sorte de succès instantané. Tout cela me paraissait terriblement normal…  » Kristiaan Debusscher, né en 1961, auteur-compositeur d’AA avec Nicolas Fransolet, reconnaît que la formation du groupe par cinq jeunes Belges – dont le bruxello-congolais Roland Bindi – trouve dans la chanteuse anglaise Sarah Osborne son parfait complément d’objet direct. Boum, la syntaxe Allez Allez fait un malheur.  » Entre nous, il se produisait un truc chimique, une énergie dingue, même en répétition. Nous étions épuisés et sans doute épuisants. » En réécoutant l’actuelle compilation parue chez N.E.W.S., les chansons tiennent étonnamment bien le coup. She’s Stirring Up, Flesh & Blood ou Turn Up The Meter troussent leur vitesse maniaque comme assoiffés d’avoir dansé le funk du samedi soir. African Queen et Valley Of the Kings mixent allègrement vocaux nègres et raclements de gorge de petits blancs ensoleillés et le morceau Allez Allez porte le court-bouillon à ébullition maximale. Les musiciens compensent leur technique instrumentale plutôt limitée par une capacité assez bluffante de s’accaparer de la musique comme s’ils en avaient inventé les règles. Et puis, Sarah, fausse peroxydée qui évoque une version fish’n’chips de Marilyn Monroe, a de la voix, de la prestance, un plus de distinction britonne.

GRANDEUR ET DéCADENCE

Pas de chance: après deux années foudroyantes qui voient Allez Allez jouer au prestigieux Old Grey Whistle Test de la BBC, partager une affiche de Forest National avec Kid Creole et être invités à Torhout-Werchter, Sarah se tire à Londres pour épouser le chanteur d’Heaven 17. « Elle nous a proposé à Nico et à moi de la rejoindre en Angleterre pour continuer le groupe mais on était complètement immatures et je ne voulais pas quitter ma petite amie. On a dit non.  » Exit Sarah dont le bref remplacement vocal par l’Américaine black Jackie Irwin ne fait guère illusion, le groupe ne survivant pas à l’année 1982. Un quart de siècle plus tard, les neuf originaux enrichis de quatre remixes nous rappellent une histoire brève mais très sympa qui fonctionne au-delà de la simple nostalgie.

www.myspace.com/bestofallezallez

PHILIPPE CORNET

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