Laurent Hoebrechts
Laurent Hoebrechts Journaliste musique

Après avoir traîné à la télé, le Français s’est replongé dans sa première passion: le rock, version poseur et sarcastique. Il a bien fait.

Sur disque, sa nonchalance et son dilettantisme pourraient faire penser à Dutronc.  » Y a pire comme comparaison, mais honnêtement, je ne l’ai jamais vraiment écouté. » Alister, tignasse généreuse et accent parigot discret, est la dernière anomalie en date de la chanson française. Ou plutôt du rock français. Enfin, on veut dire du rock en français… Bref. Alister est un ovni de la scène musicale hexagonale et ça lui va bien.

Au printemps, il a sorti son premier album, Aucun mal ne vous sera fait. Optant souvent pour le talk over, il y crâne le temps de onze chansons rêches, qui lorgnent plus du côté du Velvet Underground que de Brassens; davantage du côté du caniveau et des mégots empilés de fin de soirée que des grands élans romantiques. D’ailleurs, Alister joue volontiers le désabusé, voire le cynique – « Antisocial tu perds tes cheveux » ( Bordel). Dandy décadent –  » Je veux qu’on m’aime et qu’on me touche à Miami » ( Miami) -, Alister est néanmoins capable de baisser la garde ( 7 heures du matin, Psycho Lover).

La case télé

Derrière le personnage d’Alister se cache en fait Christophe Ernault (Paris, 1974). « Le pseudo, cela part d’une volonté de mettre une distance entre ce que je suis dans la vie et le personnage de chanteur. Une volonté de protection aussi. Après, en termes de création, je ne crois pas à l’autosuffisance d’une petite vie normale qui intéresserait la terre entière. Je crois en la sublimation ou le fantasme. Mais pas forcément à la mythomanie. »

Avant d’enfiler la veste de branleur magnifique, Alister a travaillé pour la télé. Après avoir entamé des études (histoire contemporaine), il a bien essayé de se lancer dans la musique, mais sans résultat. Puisqu’il faut bien vivre, il enchaînera donc les boulots de scénaristes pour le petit écran. Comme les sketches écrits pour La Minute Blonde sur Canal+.  » ça, c’était le top. Mais j’ai fait tout dans le genre, jusqu’à souffler des vannes dans l’oreillette des animateurs. » Avantage du passage par la case télé?  » On y apprend un certain sens de l’efficacité, comment raconter une histoire avec un début, un milieu, une fin. Le revers de la médaille, c’est que c’est un média de masse. Ce que je proposais était parfois jugé trop anxiogène, trop bizarre, trop violent. »

Au bout d’un moment, il lâche l’affaire.  » Je ne pouvais plus traîner. Quand vous voulez faire chanteur, après 30 ans, cela devient plus compliqué. » A cette époque-là, il rencontre la chanteuse Adrienne Pauly, à qui il écrit des morceaux, lui permettant de remettre tout doucement le pied à l’étrier. Au bout d’un moment, il se retrouve avec une série de démos personnelles très précises. Et un son en tête.  » J’adorais les deux disques de l’Ang-lais Baxter Dury (Ndlr: le fils de feu Ian Dury, roi du pub-rock, auteur du fameux Sex, Drugs & Rock’n’Roll) . Pour moi, ce sont des pièces essentielles du rock des années 2000. » Un contact MySpace plus tard, et l’affaire est faite: Dury produira le disque. Il ne comprend rien de ce que raconte Alister? Pas grave. Entre l’ironie cockney de l’un et les poses sarcastiques de l’autre, cela ne pouvait que coller. Evidemment, avec un parti-pris rock pareil, pas certain qu’Alister arrivera à remuer les foules hexagonales, fans de Bénabar et Raphael. Pas sûr que cela le perturbe énormément non plus…

u Aucun mal ne vous sera fait, Barclay. u www.myspace.com/alistermusic.

Laurent Hoebrechts

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