Myriam Leroy
Myriam Leroy Journaliste, chroniqueuse, écrivain

20.35 FRANCE 2

DE YAMINA BENGUIGUI. AVEC SOFIA ESSAïDI, BIYOUNA, RABIA MOKKEDEM.

Aïcha (Sofia Essaïdi, aussi convaincante en actrice qu’en chanteuse) a 25 ans, des rêves plein la tête, mais aussi des cailloux plein les poches qui alourdissent son pas. Cette jeune Française habite en HLM avec toute sa famille, en banlieue parisienne. Son fantasme: traverser le périphérique et donner corps à ses espoirs, se réaliser enfin loin de la pression du groupe, des siens, mais aussi des autres. Le quotidien de cette « Amélie Poulain des cités » – comme la qualifie son interprète – fait l’objet d’un téléfilm douloureux, catalogue de blessures liées à l’immigration et à la ghettoïsation dans les cités. Yamina Benguigui, qui a écrit et réalisé cette fiction, s’en explique.

Vous partagez avec votre héroïne la nationalité française et l’origine algérienne…

« Oui. Et le sens de la survie. Aïcha est une Shéhérazade des temps modernes. La mission de Shéhérazade était, pour sauver sa tête, de raconter une histoire différente chaque soir. Plus jeune, je m’identifiais à cette héroïne, en étant confrontée aux difficultés de la vie, aux chocs culturels,… Un autre point commun entre Aïcha et moi : on ne lâche jamais l’affaire. Pour nous, le non est le signe du top départ. »

Un film aussi dur a dû être beaucoup confronté au « non »?

Les premières négociations avec France 2 furent compliquées. Ils souhaitaient que le film soit plus formaté, qu’il ressemble à quelque chose qui existait déjà. Ils voulaient qu’on y mixe plus de Français, plus de Blancs… Or, la famille dont je parle, la famille Bouamazza, est une famille française.

Le propos de cette fiction, c’est la question de la pression du groupe…

Comment trouver le « je » quand c’est le « nous » qui régit tout? C’est propre à l’immigration – et pas au pays d’origine. Quand on arrive ici, on a tellement peur de se fondre dans la masse qu’on s’y fossilise. Je raconte 30 ans de ghettoïsation à travers une héroïne qui tente d’échapper à son groupe pour vivre son indépendance.

N’avez-vous par peur qu’Aïcha donne du grain à moudre aux intolérants? Vous y montrez un visage très noir de la banlieue…

Evidemment que la vie n’est pas idyllique dans les banlieues, elle est même parfois atroce! Des personnes âgées m’ont raconté récemment que leur ascenseur était en panne. Mais pas en dérangement trois jours: en panne 6 mois! Et certains habitent au 18ème! C’est la réalité que je raconte, et elle est catastrophique, même si les gens ne baissent pas les bras. Je montre la vie, telle qu’elle est.

Myriam Leroy

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