Sambre : la putain et le psychotique (dessins exclusifs)

© Yslaire
Olivier Rogeau
Olivier Rogeau Journaliste au Vif/L'Express

Fleur de pavé commence par un cauchemar. En rouge et noir. Rouge comme les braises de l’amour, noir comme l’ombre de la mort, les deux pôles des drames romantiques, les deux couleurs de Sambre, série culte de la BD belge. Au lecteur de deviner que ces songes obsessionnels du dernier fils des Sambre, dessinés par Yslaire dans les premières pages du nouvel album, mettent déjà en scène l’épilogue du 9ème et dernier volume, à paraître en principe fin 2018.

Clarifions pour les non-initiés et tous ceux qui, à force d’attendre l’arrivée de ce 7ème tome – le 6ème est sorti il y a plus de cinq ans -, ont perdu le fil de la chronique sambrienne. Il y a trente ans, le dessinateur Bernard Hislaire ( » Yslaire « ) entame la tragédie des Sambre, saga familiale dans la France révolutionnaire du XIXe siècle. Pas une once de second degré dans cette histoire d’amour impossible, conçue en étroite collaboration avec le scénariste Balac (alias Yann) : les auteurs ont clairement pour but de  » faire pleurer Margot « , selon la formule de Musset.

Salué par la critique et le public, le premier album, Plus ne m’est rien…, est considéré comme l’une des oeuvres graphiques majeures de la BD des années 1980. Yslaire rencontre enfin le succès dont il a tant rêvé. Mais il est accablé de soucis personnels et ne s’entend plus avec Balac. Il réalisera en solo la suite de la saga. Et confiera à de jeunes auteurs le dessin de trois cycles dérivés (La Guerre des Sambre), consacrés aux ancêtres des héros créés il y a trente ans.

Ces jours-ci sort donc le 7ème et antépénultième album de la série d’origine. Le cycle porte le nom des Sambre, famille maudite, mais Julie Saintange, la jeune braconnière aux yeux rouges, passion funeste de Bernard Sambre au début de l’histoire, en est devenue le personnage central, auquel Yslaire avoue s’identifier. Car, contrairement à ce qu’avaient prévu les créateurs, elle a survécu à son amant, fauché par les balles de l’armée sur les barricades de la révolution de 1848 à Paris. Condamnée aux travaux forcés, Julie n’a pas connu les jumeaux qu’elle a mis au monde. Le garçon, Bernard-Marie, est élevé à la bastide familiale, dans le midi de la France, par sa tante Sarah. Elle entretient auprès de lui le culte morbide de ses ancêtres et le déni de sa mère. D’où les fantômes qui hantent ses cauchemars de psychotique.

La soeur jumelle du garçon, Judith, grandit à Paris dans la misère d’un orphelinat. La petite fille rebelle, qui ignore l’existence de sa mère et de son frère, s’émancipe avec la complicité de deux gavroches. Débrouillarde, elle vit la bohème des bas-fonds et finit par vendre ses charmes.  » Malgré eux, les deux orphelins se cherchent déjà dans l’invisible, prévient Yslaire. Après la passion tragique de Bernard Sambre pour Julie, il y aura celle de leurs enfants.  » Un destin que les lecteurs découvriront dans les deux ultimes volets de la saga de sang et de cendre.

Fleur de pavé (Sambre tome VII), par Yslaire, chez Glénat.

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