Patti Smith: “Une saison en enfer a été la drogue de mes jeunes années”

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Philippe Manche Journaliste

Patti Smith habille de ses textes, photos et dessins la réédition d’Une saison en enfer d’Arthur Rimbaud, 150 ans après sa première parution.

Avec Un amour de Swann transcendé par Pierre Alechinsky, Patti Smith est la cinquième personnalité à figurer dans la collection Grande Blanche illustrée qui invite des artistes contemporains à créer autour d’un texte de leur choix. Du pain bénit pour la poétesse et punk-rockeuse américaine, qui revisite à travers Une saison en enfer, 1873 et autres poèmes celui dont elle ne cesse de clamer sa filiation depuis l’adolescence. “J’avais 16 ans quand j’ai découvert Arthur Rimbaud, écrit-elle dans un des textes qui jalonnent ce bien bel ouvrage. J’étais attirée par son visage et ses poèmes, qui m’intriguaient et me fascinaient. Envoûtée par leur charme grisant, j’en émergeais tremblante, gardant peu de souvenirs de ce que j’avais lu. Malgré cela, ses mots s’étaient en quelque sorte gravés dans mon cerveau, enroulés comme un cordage sur le pont d’un navire abandonné au milieu d’une brume mortelle. Une saison en enfer a été la drogue de mes jeunes années, l’élixir recelant les outils et la méthode pour renverser les fausses idoles. Tel est le pouvoir exaltant de la poésie.” “Compagne invisible”, la prose d’Arthur Rimbaud, guide, grand frère, amant secret, coule dans les veines de Patti Smith comme les solos de John Coltrane.

Son livre hommage compile photos, textes et dessins.
Son livre hommage compile photos, textes et dessins. © National

L’homme aux semelles de vent

La poésie de l’auteur du sublime Le Dormeur du val habite Horses, le brûlant premier album de Patti Smith, et a toujours été présente, même en filigrane, dans la discographie de celle qui est devenue propriétaire en 2016 d’une bâtisse qui jouxte les ruines de la ferme familiale du poète à Roche, dans les Ardennes françaises. Lire ou relire aujourd’hui Une saison en enfer comme Les Premières Communions, repris également dans cette nouvelle édition agrémentée de souvenirs intimes de la poétesse, fait jaillir une évidence. L’Américaine ne pouvait être insensible, comme Dylan ou Morrison, à la poésie libertaire et funèbre de celui que Verlaine avait coutume d’appeler “l’homme aux semelles de vent”. Le journaliste et essayiste Pierre Lemarchand proposait récemment à travers Patti Smith & Arthur Rimbaud: une constellation intime (aux éditions Le mot et le reste) un angle inédit de ce que fut l’importance du poète et explorateur dans la construction artistique et intellectuelle de l’artiste. Marraine du projet du nouveau musée Rimbaud en 2011, elle se rend à Charleville-Mézières pour la première fois en 1973 via Sam Wagstaff, l’amoureux et mécène du photographe Robert Mapplethorpe, qui lui offre le billet d’avion. Deux ans plus tard, elle tombe amoureuse du chanteur et guitariste de Television: un certain Tom Verlaine… Comme quoi!

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