Les dix livres de poche à glisser dans sa valise cet été
Pour un été parfait, Focus vous propose dix livres de poche à glisser dans ses bagages. À lire par tous les temps.
Ensorcelant: Les Éclats
Ensorcelant: Les Éclats
De Bret Easton Ellis, éditions 10/18, traduit de l’anglais (États-Unis) par Pierre Guglielmina, 912 pages.
Le trublion des lettres américaines revient hanter les lieux paradisiaques de son premier roman, Moins que zéro, pour une chronique moite et paranoïaque d’événements tragiques ayant pour épicentre les beaux quartiers de Los Angeles au début des années 80. Dans une mise en abîme vertigineuse, Ellis se glisse dans la peau de Bret, ado de 17 ans titillé par le démon de l’écriture qui observe avec angoisse ses tourments intérieurs et les jeux d’influence d’une jeunesse oisive sous coke, avec en toile de fond la menace persistante d’un serial killer. Un portrait métaphysique obsédant d’une Amérique rongée par le mensonge et les faux-semblants. Jouissivement vénéneux. – L.R.
VIsion double: Le Trésorier-payeur
VIsion double: Le Trésorier-payeur
De Yannick Haenel, éditions Folio, 464 pages.
Convié à une installation autour de Georges Bataille, Haenel lui découvre un homonyme qui occupa le poste de Trésorier-payeur de la Banque de France à Béthune. Entremêlant les idées du penseur dans la biographie romancée de l’employé de banque, l’auteur de Tiens ferme ta couronne plonge au cœur d’une expérience de fascination. Autour du concept d’apologie de la dépense cher au poète-philosophe, ce roman vertigineux embrase mystique de l’érotisme et élans de pure miséricorde. Luxuriant et jouissif. – F.DE.
Déconnexion: GPS
Déconnexion: GPS
De Lucie Rico, éditions Folio, 202 pages.
Au point mort dans sa carrière de journaliste de faits divers et à la dérive, Ariane doit se rendre, comme témoin, à la fête de fiançailles de son amie Sandrine. Mais plutôt que de venir l’extraire de ses élucubrations habituelles, la future mariée partage juste sa localisation, avant de disparaître (sauf des radars). Roman à la deuxième personne ultra futé (entre faux polar, quête bousculée de soi et réflexion sur nos usages connectés), GPS confirme Lucie Rico comme une des nouvelles voix les plus singulières. – A.R.
Choc: Faire les sucres
Choc: Faire les sucres
De Fanny Britt, éditions J’ai Lu, 288 pages.
Couple bourgeois blanc à la vie rangée, Marion et Adam voient leur carte postale idyllique chamboulée le jour où Adam percute Célia (une jeune fille noire) lors d’un accident de surf. Roman choral à la minutie psychologique notable, Faire les sucres nous entraîne de Martha’s Vineyard à Montréal ou aux érablières (où travaille la famille de Célia), tout en passant férocement au tamis la question des privilèges. L’été pourrait être une belle occasion de découvrir l’autrice québécoise, qui se dit notamment influencée par Virginia Woolf. – A.R.
Hilarant: Les meufs c’est des mecs bien
Hilarant: Les meufs c’est des mecs bien
De Mourad Winter, éditions Pocket, 368 pages.
C’est l’histoire d’un gars « musulman de la team » dont la meuf décide de porter le voile (pas le catholique), alors qu’elle a fait sa première communion. Mourad Winter dézingue avec une jubilation communicative les petites approximations contemporaines de nos quêtes (ou crispations) identitaires. Un roman d’ici et maintenant à l’érudition pop ultra contemporaine, servi par une langue mêlant avec virtuosité moult niveaux de langages et intégrant avec vélocité parler populaire et références culturelles. – A.E.
Souvenirs: Dans les rues du barrio
Souvenirs: Dans les rues du barrio
De Piri Thomas, éditions 10/18, traduit de l’anglais (États-Unis) par Romain Guillou, 480 pages.
Né d’une mère cubaine et d’un père portoricain, l’auteur (1928-2011) a traîné ses basques d’adolescent dans le Spanish Harlem de l’après-guerre. Moins dépeint que d’autres, le quartier trouve dans ces mémoires une vivacité et une épaisseur authentiques. Entre bagarres, addictions, pauvreté, prison et rédemption, Thomas interroge son identité en tension: celle d’un homme noir et latino-américain dans un New York peu enclin à accepter les différences. – A.R.
Rencontre: Les Arpenteurs du monde
Rencontre: Les Arpenteurs du monde
De Daniel Kehlmann, éditions Babel, 298 pages.
La science est un voyage. C’est en tout cas le propos de ce roman de jeunesse haletant de Daniel Kehlmann, qui nous entraîne dans les pas de deux grands scientifiques, Allemands comme lui: Alexandre von Humboldt, explorateur intrépide, parti mesurer le méridien au-dessus des volcans et en Amazonie, et Carl Friedrich Gauss, mathématicien et astronome de génie, casanier invétéré. Les deux hommes s’avèrent en communauté de pensée et de calcul, voire d’action dans ce livre palpitant qui n’en manque pas. – B.R.
Dancefloor: L’homme qui danse
Dancefloor: L’homme qui danse
De Victor Jestin, éditions J’ai Lu, 192 pages.
Pour fuir un quotidien morne encombré par la solitude et une timidité maladive, Arthur se réfugie dans un dancing de province qui devient le centre de gravité exclusif de son existence. Persuadé d’avoir trouvé dans cet univers parallèle une voie royale vers la reconnaissance et le grand amour, il se sculpte un corps de rêve et apprend à danser comme un dieu. Mais s’il brille la nuit, le noceur redevient un loser comme les autres une fois franchies les portes de La Plage. Victor Jestin décrit parfaitement la magie ensorcelante de ces lieux de plaisir qui mettent la réalité à distance. Mais condamnent ceux qui s’y perdent à des réveils douloureux et amers. – L.R.
Tout un monde: Sud
Tout un monde: Sud
D’Antonio Soler, éditions Rivages, traduit de l’espagnol par Guillaume Contré, Rivages, 562 pages.
Lors d’une journée unique mais particulièrement caniculaire, la ville de Málaga (d’où est originaire Soler) va brasser, entre vulnérabilités, désirs, frustrations ou rêves un chœur impressionnant de personnages de tous les horizons, âges ou conditions sociales. Véritable roman-monde, Sud a la densité hypnotique et poétique suffisante pour occuper de longues heures de hamac ou de transports. Préparez-vous à être ébouriffés par sa construction prodigieuse, sa focale omnisciente et ses images à vous tatouer la rétine. – A.R.
Classique: La bête qui sommeille
Classique: La bête qui sommeille
De Don Tracy, éditions Gallimard/Série Noire Classique, traduit de l’anglais (États-Unis) par Marcel Duhamel et Jacques-Laurent Bost, 224 pages.
Écrit en 1938 par Don Tracy -publié en 1951 en France et réédité aujourd’hui- La bête qui sommeille, outre son titre qui résonne, reste d’une incroyable modernité. Soit l’histoire d’un jeune Noir à la coule qui, ivre mort, assassine une prostituée blanche. Et transforme cette petite ville de l’est des États-Unis en terrain de haine pure. Extrêmement violent -le roman a été refusé aux États-Unis- et choquant, La bête qui sommeille est une réflexion glaçante sur la violence collective.
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