David Joy met l’Amérique face à son racisme systémique dans un polar rural tendu
David Joy, Sonatine
Les Deux visages du monde
432 pages
Une artiste afro-américaine de retour dans sa petite ville met le feu aux poudres en déterrant une vieille histoire. David Joy met l’Amérique face à son racisme systémique dans un polar rural tendu.
Artiste afro-américaine installée à Atlanta, Toya Gardner a choisi de passer l’été dans la petite ville de montagne de Caroline du Nord dont est originaire sa famille, et où vit toujours sa grand-mère Vess. En apparence, un petit coin tranquille et sans histoire. Jusqu’au jour où la jeune femme met en scène des tombes vides à l’endroit où se trouvait une ancienne église méthodiste et son cimetière, tous deux expropriés en 1929 pour faire place à un campus. Une installation artistique et politique destinée à rappeler que dans la communauté noire locale, ce trauma se transmettait « de génération en génération ». Provocation inutile pour les uns, rappel nécessaire du passé esclavagiste de la région pour les autres. Rapidement, la tension monte. D’autant qu’au même moment, deux policiers découvrent dans la voiture d’un étrange voyageur une tunique du Ku Klux Klan et un carnet reprenant les noms de notables du coin. Le racisme systémique et souterrain est au coeur de ce polar rural tendu.
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Les masques tombent dans un climat devenu explosif suite à un double crime. La ligne de démarcation qui n’a jamais cessé d’exister refait surface: d’un côté, les suprémacistes, de l’autre les Noirs, avec au milieu, dans une zone grise, ces Blancs qui jurent qu’ils ne sont pas racistes mais n’ont jamais questionné leurs privilèges. Comme le shérif Coggins, vieil ami de la famille, qui ne comprend pas que Toya s’en prenne aussi à la statue d’un soldat confédéré qui trône depuis plus d’un siècle devant le palais de justice. « Les gens aiment croire que le racisme se manifeste de telle ou telle façon, que c’est une pancarte « RÉSERVÉ AUX BLANCS » sur la devanture d’un restaurant ou une croix qui brûle dans le jardin de quelqu’un mais c’est pas forcément ça. Ça peut être bien plus subtil que ça », résume Vess, en référence à toutes les vexations qu’elle et son défunt mari ont endurées en silence pour ne pas faire de vagues. Dans ce coin de nature sauvage qu’il décrit avec un luxe de détails, David Joy tire les fils d’un redoutable polar rural et choral qui met chacun face à ses responsabilité dans la perpétuation d’un racisme systémique. Certaines plaies ne cicatrisent pas.
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