Critique | Livres

Le chewing-gum de Nina Simone, relique sacrée de Warren Ellis

4,5 / 5
Le chewing-gum. Il trône ici sur la serviette maculée de la sueur de la géniale Nina Simone. Warren Ellis le conservera 20 ans durant au creux de cet écrin lui aussi dérobé à l’issue de ce concert qui changea sa vie. © Warren Ellis

Warren Ellis, La Table Ronde

Le Chewing-gum de Nina Simone

223 pages

4,5 / 5

En 1999, Warren Ellis récupère le chewing-gum mâchouillé lors d’un concert par Nina Simone. Dans un livre de souvenirs et photos personnels, il fait de cette relique de la chanteuse la porte d’entrée dans son petit cabinet de curiosités intimes.

Un livre?! Quand Dan Papps, de la prestigieuse maison d’édition anglaise Faber, propose à Warren Ellis de publier ses mémoires, il est moyennement partant. Sa vie est pourtant des plus trépidantes et riches en rebondissements matière à foison d’anecdotes: après des débuts au sein du groupe instrumental Dirty Three, il accompagne sur scène depuis plus de 30 ans Nick Cave (il est une des légendaires Bad Seeds), et compose les scores, seul ou avec le grand Nick, de nombreux films (comme celui de Blonde d’Andrew Dominik).

Warren Ellis se prend en photo dans le reflet d’une fenêtre de la façade de la maison natale de Nina Simone. Sur son rebord, il a disposé le pendentif à l’effigie du chewing-gum (réalisé par la styliste flamande Ann Demeulemeester), et le livre qu’il lui a consacré. La boucle est bouclée.
Warren Ellis se prend en photo dans le reflet d’une fenêtre de la façade de la maison natale de Nina Simone. Sur son rebord, il a disposé le pendentif à l’effigie du chewing-gum (réalisé par la styliste flamande Ann Demeulemeester), et le livre qu’il lui a consacré. La boucle est bouclée. © Warren Ellis

Lorsque Cave lui propose de participer à son exposition Stranger than Kindness, à Copenhague, lui vient alors l’idée d’y exposer son “totem”: un chewing-gum ayant été mâchouillé par l’immense “Doctor” Nina Simone lors d’un concert en 1999 au Meltdown Festival, d’ailleurs dirigé cette année-là par Cave. Encore sous le choc de la prestation de Nina, “dans un moment d’extase”, dira Nick Cave, Warren Ellis se précipite sur scène et s’empare du chewing-gum abandonné par l’icône sur son piano de marque Steinway. Il le gardera précieusement auprès de lui pendant 20 ans. C’est en gros le pitch qu’il finira par tenir au staff de Faber, médusé.

Nick Cave sur scène (ici de dos). En pleine répétition pour la tournée Skeleton Tree, Warren Ellis pose son violon, et immortalise l’instant. «J’ai pris cette photo parce que c’était la première fois que je retrouvais sa présence scénique de toujours, celle d’avant la mort de son fils Arthur en 2015 © Warren Ellis

Le goût des souvenirs

Dans Le Chewing-gum de Nina Simone, le “violon dingue” de la bande à Nick Cave nous conte, en fil rouge, les aventures agitées de cette sacrée gomme à mâcher qu’il va patiemment mener au statut de relique sacrée. Bourré de photos et pareil à un catalogue d’exposition justement, le livre n’est pas véritablement une biographie. Mais de digressions sur son passé en inventaires des milliers d’objets retrouvés dans les attachés-cases entassés chez lui au fil des années et des tournées, en passant par quelques apparitions troublantes du fantôme de Beethoven, Ellis trouve un ton, une voix touchante, qui réconforte durablement quiconque ouvre ce superbe objet.

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