The Dropout ausculte la fascinante construction des mensonges d’Elizabeth Holmes. L’image de la Silicon Valley en prend un sacré coup au passage.
Le récit de l’ascension et de la chute d’Elizabeth Holmes, aspirante gourou de la Silicon Valley et fondatrice de Theranos, société de technologie médicale prétendument révolutionnaire évaluée à 9 milliards de dollars, a été rapporté de long en large à coups de reportages, documentaires (The Inventor, produit en 2019 par HBO) et livres (Bad Blood de Jim Carryrou). Et d’un podcast signé Rebecca Jarvis, The Dropout, objet de cette adaptation en fiction pour Disney+. Rejoignant la cohorte de séries biographiques peu de temps après Inventing Anna (de Shonda Rhimes sur Netflix), The Dropout évite habilement les écueils de cette dernière. Elle propose une immersion dans les mécanismes du storytelling, du narcissisme et de la fascination qui nourrissent les fables contemporaines du capitalisme technologique.
Née dans une famille WASP dysfonctionnelle et accaparante, entourée d’un cercle d’amis tech-entrepreneurs, Elizabeth Holmes quitte à 19 ans l’université de Stanford, où elle venait d’entrer, pour fonder sa propre compagnie, Theranos. Sa « vision »: offrir au plus grand nombre un système révolutionnaire de prise et d’analyse de sang, remplaçant la seringue et les tubes par une gouttelette extraite de l’index. Sauf que ça n’a jamais marché, même lorsque Holmes faisait les unes des magazines, hissée en nouvelle héroïne tech. La série expose patiemment comment Holmes a bâti son empire, réussissant une étape après l’autre à mystifier employés, financiers et les membres de son propre comité directeur, puisés dans la très haute élite américaine.
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L’envers du décor
Plutôt que jouer la carte de l’irrésistible ascension, le scénario préfère d’emblée dévoiler tout ce qui ne collait pas dans la promesse (non tenue) de Theranos et, plus encore, dans le personnage que s’est construit Holmes, largement influencé par son admiration pour Steve Jobs. Ce faisant, The Dropout dévoile comment la distorsion de la réalité a joué à plein dans la mystification. En éclairant la duperie caractérisée dont Holmes et son amoureux et COO Sunny Balwani se sont montrés coupables (ils ont été condamnés en janvier 2022 pour fraude), la série déconstruit les dynamiques de disruption du capital-risque appliqué à la start-up nation avec une intelligence délectable, malgré quelques grosses ficelles. Les personnages de Holmes et Balwani bénéficient des prestations appuyées de Amanda Seyfried (Mamma Mia) et Naveen Andrews (Lost). Seyfried, surtout, empoigne les contradictions et les anomalies manifestes de son personnage avec beaucoup d’aplomb. Son portrait saisissant, habité, contribue à nourrir la curiosité et l’intérêt pour ce récit édifiant mené tambour battant.
The Dropout
Une série créée par Elizabeth Meriwether. Avec Amanda Seyfried, Naveen Andrews, Utkarsh Ambudkar. Disponible sur Disney+. ***(*)
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