Critique | Expos

Albert Baronian: 50 ans d’observation affûtée de l’art contemporain

3,5 / 5
© fabrice schneider
3,5 / 5

Concert - Exposition collective curatée par Albert Baronian

Date - Jusqu'au 25/11

Salle - À la Fondation Cab, Bruxelles

Michel Verlinden
Michel Verlinden Journaliste

Depuis 50 ans, le galeriste Albert Baronian a vu beaucoup… et bien souvent avant les autres. Une exposition témoigne de son regard aiguisé.

Ce n’est pas la première fois qu’Albert Baronian prend ses quartiers à la Fondation CAB. En 2014, il avait déjà signé Bande à part à l’occasion de ses 40 années à la tête d’une galerie qui a vu le jour en septembre 1973. Il avait même remis le couvert quatre ans plus tard à la faveur d’une lumineuse proposition autour du néon, Shaping Light, -un goût de la brillance dont Quinquagesimum se fait l’écho par le biais de OO (2023), sculpture constituée d’un double néon rouge et bleu que l’on doit à la Suissesse Marie José Burki.

Petit titre de gloire: l’intéressé est le seul galeriste à avoir eu les faveurs de cet ancien entrepôt Art déco dédié à l’art minimal. Face au Morn (2021) de Gilbert & George, les visiteurs attentifs remarqueront que le malicieux jubilaire a réussi à tordre le bras d’une programmation qui fait habituellement l’impasse sur la figuration. Ce favoritisme très tapis rouge s’explique: Baronian appartient au cénacle des galeristes précurseurs de l’art contemporain à Bruxelles. Avec ceci de particulier qu’il a su rester à l’écoute des différentes tendances qui ont traversé ces cinq dernières décennies. Sans oublier la mémoire qu’il porte en lui. L’homme a notamment vécu la période où la création actuelle n’intéressait personne, cette temporalité de vaches maigres constituée de vernissages, aujourd’hui très improbables, qui rejouaient le même trio embarrassant: l’artiste et sa femme, flanquée du fidèle galeriste.

Grand ouvert

Le risque que l’on court face à une personnalité ayant de la bouteille, c’est d’être confronté à ce rétrécissement de l’émerveillement qui caractérise ceux qui pensent avoir tout vu. Il n’en est rien dans le cas d’Albert Baronian. Il a beau pester à droite et à gauche sur ce qui était mieux avant, son regard ne s’est pas atrophié. On en veut pour preuve la sélection d’une magnifique pièce portant la patte de Charlotte vander Borght, artiste belge installée à New York. No One (2023) se présente comme la variation matiériste, réorientée verticalement, d’un siège de métro, bouée concrète et sentimentale de l’espace public ainsi transformée en émouvante pièce tridimensionnelle.

On pointe également le flair indéniable du septuagénaire, notamment devant une toile au chromatisme percutant, Goya’s Lantern (2012), achetée bien avant que la cote de l’artiste afro-américain Stanley Withney ne s’envole. Idem pour Concordia (1987), impressionnante composition, signée Matt Mullican, de couleur bleue -chez cet artiste issu de la “Pictures Generation”, le bleu caractérise les scènes de la vie quotidienne (à gauche sur la photo). Enfin, autre temps fort du parcours, et symptôme éloquent de l’ouverture d’esprit à l’œuvre, signalons la présence de Charles Sandison, dont le langage plastique inspiré par un codage informatique simplifié fait mouche. Waterlilies (after Monet) (2011) projette sur fond blanc ces mots kinétiques et hypnotiques qui ont fait la réputation de l’artiste britannique.

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