Olivier Van Vaerenbergh
Olivier Van Vaerenbergh Journaliste livres & BD

ANIMAL LECTEUR ADOPTE LE FORMAT STANDARD POUR SON CINQUIÈME ALBUM. UN PASSAGE DU STRIP À LA PLANCHE QUI CONTINUE DE DÉSHABILLER NOS MoeURS DE BÉDÉPHILES.

Animal Lecteur – C’était mieux avant!

DE SERGIO SALMA ET LIBON, ÉDITIONS DUPUIS, 56 PAGES.

7

Autant l’écrire tout de suite: votre serviteur n’est pas neutre en attaquant la chronique du dernier tome de Animal lecteur, la BD sur les moeurs de la BD, écrite depuis huit ans par Salma et mise en dessin par Libon; dans une autre vie et dans la rédaction de Spirou, on a plus qu’assisté à la naissance de ce strip drôle et vertical, né pour animer le sommaire du journal.

Sergio Salma était et est toujours un auteur prolixe, rôdé à l’animation mais aussi spectateur attentif et amusé de son secteur d’activités; Libon était et est un auteur français proche du génie graphique mais bien trop rare encore; la rédaction, elle, était en demande d’un strip drôle, et vertical, braquant pour une fois ses caméras vers le lecteur plutôt que vers ses auteurs. Le tout a donc donné cet Animal lecteur drôlissime et parfois féroce sur les us et coutumes du secteur et de ses lecteurs. Lequel avait connu jusqu’ici quatre « demi-albums », fidèles au format. Mais l’Animal évolue désormais aussi en planches typiquement franco-belges, et s’offre donc un nouveau format pour son nouveau tome. Qu’on ne s’y trompe pas: si le libraire de « BD Boutik » y est plus que jamais le personnage récurrent, il le doit surtout à sa position stratégique, coincé qu’il est entre l’offre des éditeurs et la demande des lecteurs. Questions absconses, livraisons de fin d’année, crise du secteur et de ses amateurs… Rien ne lui est épargné, pour notre plus grand plaisir parfois en forme de petites claques derrière la nuque: malgré les gros nez de Libon, tout amateur y reconnaîtra un peu de son fétichisme et de ses TOC.

Libon, que du bon

Restait, derrière toutes ces qualités intrinsèques, ce passage en grand format, accompagné d’un titre qui tend le bâton pour se faire battre: C’était mieux avant!. La question, expression classique des lecteurs de BD nostalgiques, pouvait effectivement se poser face à ce changement de format et donc de rythme. Mais si l’on a effectivement droit à quelques longs récits en voix off parfois un peu pesante mais prenant le temps, cette fois, de décortiquer la chaîne du livre et de la bande dessinée, on reste plus que jamais sous le charme et la drôlerie des dessins de Libon, auteur authentiquement poilant et au trait purement personnel. Père du choupinou Tralaland chez Bayard ou du complètement décalé Jacques, le petit lézard géant déjà chez Dupuis, il ne manque à Libon qu’un plus large succès pour en convaincre le grand public. C’est tout le mal qu’on souhaite à cet Animal lecteur standardisé, susceptible d’accrocher les consommateurs de bande dessinée: on s’y retrouve à tous les coups.

EXPOSITION AU CBBD JUSQU’AU 16/02/14, RUE DES SABLES, 20 À 1000 BRUXELLES. WWW.CBBD.BE

OLIVIER VAN VAERENBERGH

Vous avez repéré une erreur ou disposez de plus d’infos? Signalez-le ici

Partner Content