Stranger Things: retour vers le passé
Succès de l’été et de l’année pour Netflix, Stranger Things fait l’unanimité auprès des adulescents fans de Spielberg, Stephen King ou John Carpenter. Du bel ouvrage bien vu, en plein revival eigthies.
Les premières images de Stranger Things -comme les suivantes d’ailleurs- ne laissent planer aucun doute sur les références, plus qu’assumées: un lent travelling vertical partant d’un ciel étoilé, un labo, une porte blindée, un savant affolé, la porte d’un ascenseur qui ne se ferme pas. Un cri, une… créature, puis le générique, « entre Tron et V, j’ai adoré! », comme me le diront beaucoup de quadras enthousiastes. Et puis la touche finale, définitive, pour entamer réellement la série: quatre gamins, mi-geeks, mi-losers, et qu’on croirait sortis des Goonies, jouent à Donjons & Dragons. Nous voilà en 1983 dans un bled perdu de l’Indiana, où des choses effectivement plus qu’étranges vont se dérouler. Et si les huit épisodes de la première saison de Stranger Things ne manquent ni de cliffhangers ni de surprises, la plus grande est ailleurs: on se surprendrait presque à ne pas devoir rembobiner la cassette après le visionnage! Comme à ce bon vieux temps que les moins de 30 ans ne peuvent pas connaître, où le « teenage movie » prenait naissance, où Stephen King, John Carpenter et les productions Amblin régnaient en maître dans les vidéoclubs. Et où Stranger Things puise l’essentiel de son attrait.
Plus qu’une simple madeleine
Références, donc. A l’heure où le revival eighties semble atteindre son apogée -la génération particulièrement nostalgique des adulescents quadras à la J.J. Abrams a définitivement pris les commandes, tant de l’entertainment américain que du divertissement francophone, du retour de Star Wars à la prochaine resucée très attendue de la série animée Il était une fois… la Vie-, Stranger Things débarque au bon endroit, au bon moment et avec les bonnes tables de la Loi. Soit un gloubi-boulga extrêmement bien digéré de références, d’esthétiques et de clins d’oeil au cinéma US et ses séries B d’alors – l’affiche de la série est ainsi un modèle du genre. Restaient aux frères Duffer, les petits génies à la manoeuvre, à dépasser ce jeu amusant mais quand même un peu creux des allusions, pour donner corps à une série de 400 minutes, capable d’encore émouvoir, faire peur ou accrocher, les ados d’aujourd’hui y compris. Et ça marche.
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Le premier épisode plante le décor, les acteurs principaux -dont les deux revenants Winona Ryder et Matthew Modine, à eux seuls très « 80’s credibility »- et le ressort principal de la série: le jeune Will Byers, membre de la bande des 4, va disparaître, alors que surgit de nulle part une gamine quasi muette, tatouée du chiffre 11 sur le bras. Deux choses étranges qui ouvrent intelligemment la porte à toutes les possibilités: invasion extraterrestre, pouvoirs psychiques, quatrième dimension, armes secrètes de l’armée, monde parallèle? Evidemment un peu de tout ça, dans une intrigue suffisamment chewing-gum pour connaître une deuxième saison si le succès est au rendez-vous (c’est le cas) voire bien plus en cas de phénomène à la Lost (on y est presque). Car que l’on ne s’y trompe pas: si Stranger Things fait le buzz en tant que madeleine « 80’s », les frères Duffer ont aussi assimilé des références plus modernes -l’ombre de Nicolas Winding Refn et de l’esthétique visuelle et sonore de Drive plane au-dessus de certaines scènes, autant que celles de Joe Dante ou de Freddy Krueger. Le cynisme en moins: en revenant aux eighties, Stranger Things renoue aussi avec un esprit plus naïf, plus spontané, que le XXIe siècle n’est plus capable de proposer: que de suspense le bon vieux temps de l’analogique était capable d’offrir! On ne sursaute plus aujourd’hui au grésillement d’un talkie-walkie ou à la sonnerie d’un téléphone mural. À regarder Stranger Things, c’est bien dommage.
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Références à foison
Si Stranger Things n’oublie jamais de revenir au premier degré quand l’angoisse ou le suspense l’exigent, ses huit épisodes sont remplis à ras bord de références explicites ou inconscientes au cinéma US et teenage de cette année 1983. Bref aperçu.
Dans le premier épisode, les hommages les plus appuyés reviennent sans surprise à Steven Spielberg, et à E.T. en particulier. Les frères Duffer reproduisent ainsi presque à l’identique plusieurs plans et scènes-clés du film: les gamins roulant à vélo sur fond de clair de lune -image qui deviendra le logo de Amblin, la société de production de Spielberg- ou les scientifiques en combinaison blanche dont les torches électriques fendent l’obscurité.
Les chambres des quatre gamins au coeur de Stranger Things sont couvertes d’affiches ou d’objets référencés: on peut y voir Jaws, Alien et évidemment Star Wars. Des citations directes sont également faites autour de Halloween (pour la créature sans visage) et Poltergeist.
Dans l’épisode 4, un flic de faction devant une chambre lit un roman de Stephen King. On ne voit que son visage et la quatrième de couverture, mais le shérif le remarque et insiste: « Celui-là, il est tordu à souhait! » On met une pièce sur Dead Zone ou Simetierre.
Dans l’épisode 7, le film All the Right Moves est diffusé dans le cinéma de la ville. L’esprit d’équipe, en français, est effectivement sorti en 1983, teenage movie dont on a surtout retenu le jeune acteur, un certain Tom Cruise.
Dans le 8e et dernier épisode de cette première saison, la référence et l’hommage le plus explicite revient à The Thing de John Carpenter (1982): les gamins s’extasient sur la qualité de ses effets spéciaux (en l’occurrence, quand la tête du géologue Vance Norris se ramollit et se détache).
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